Examen critique des données mondiales de température de surface /3

3.4. La glace de mer

 

Les séries SST nécessitent des estimations des zones de l'océan recouvertes de glace. Toutefois, les régions couvertes de glace sont dangereuses pour la navigation et les données sont rares avant l'arrivée des satellites (c. 1978). Rayner et al. (2003) décrivent les cartes Walsh NH de concentration des glaces de mer entre 1901et 1995. Ces observations sont basées sur les observations disponibles de navires des régions avec banquise ; cependant, Rayner et al. remarquent que seules les marges peuvent être observées et que la couverture au-delà a dû être considérée comme uniforme. En outre, ils notent qu'il n'y a pas de données du tout pour les mois d'automne et d'hiver (Septembre – Mars) de 1901 à 1956, et que la concentration des glaces de mer dans les zones marginales a dû être estimée à partir des données d'été. Le HadISST utilise les observations par satellite à partir de 1978, ce qui a nécessité un ajustement pour rendre la série compatible.
Les données sur l'étendue des glaces de mer autour de l'Antarctique ne sont devenues disponibles qu’à partir de 1973 via les observations par satellite. Avant cela, il y a eu quelques observations basées sur des expéditions de recherche. Le HadISST utilise un enregistrement allemand de 1929-1939, et le répète en arrière dans le temps jusqu’en 1871. Une série d'un institut de recherche russe est utilisée pour la période 1947-1962. Les autres années ont été interpolées jusqu'à ce que des mesures par satellite soient devenues disponibles.

3.5. SST ou température de l'air ?

Lors de la production des séries globales, la SST est combinée avec les données du GHCN sous l'hypothèse que les deux créent ensemble une moyenne de température de l'air près de la surface. Sur la page CRU FQA (http://www.cru.uea.ac.uk/cru/data/temperature/) la question de savoir pourquoi la SST est utilisée reçoit la réponse suivante ( souligné par l'auteur) :

« Sur l’étendue des zones océaniques, les mesures de température les plus abondantes et les plus cohérentes ont été relevées à la surface de la mer. Des températures de l'air marin (MAT) sont également prises qui, idéalement, devraient être préférées lorsque on les combine avec des températures terrestres, mais elles impliquent des problèmes d’homogénéité plus complexes que les SST (Rayner et al., 2003). Les problèmes sont moindres si on n’utilise que les températures nocturnes (NMAT), mais au prix du rejet d'environ la moitié des données MAT. Notre utilisation des anomalies de SST implique que nous assumons tacitement que les anomalies de SST sont en accord avec celles des MAT. De nombreux tests montrent que les anomalies NMAT sont en bon accord avec celles des SST sur une base saisonnière et sur des échelles de temps plus longues dans la plupart des cas en haute mer. »

Globalement, l'accord est actuellement très bon (Rayner et al, 2003), encore meilleur que selon Folland et al. (2001b). Toutefois, certaines différences de tendances régionales en haute mer ont été récemment trouvés sous les tropiques (Christy et al., 2001).

Les enregistrements de température d’air marin (MAT) sont très rares et sont affectés par la croissance en hauteur des navires au cours du siècle, ce qui signifie que ces températures ne sont pas strictement comparables dans le temps, sauf dans les cas où elles sont mesurées à une hauteur constante au-dessus du niveau de la mer. La référence Christy et al. (2001) est intéressante à cet égard. Christy et al. se sont concentrés sur des endroits où ils pouvaient comparer directement des mesures de l'air marin et de la SST dans les mêmes lieux. Ils ont examiné, pour la période 1979-1999, les enregistrements de SST et de la température de l’air marin (MAT) à bord des navires, ainsi que des données provenant des satellites météorologiques, des ballons météo et d’un réseau de bouées dans le Pacifique tropical. Les données du réseau de bouées sont particulièrement utiles car elles mesurent la température à un mètre sous la surface et à trois mètres au-dessus au même endroit. Dans toutes les comparaisons entre les SST et les températures de l'air, ils ont constaté que l'océan se réchauffait plus que l’air, ce qui indique que la SST amplifie les tendances de température de l'air. En outre, trois des jeux de données de température de l'air (satellite, ballons et réanalyses) indiquent que la température de l'air marin juste au-dessus de la surface de l'océan s’est refroidie partout sous les tropiques à un rythme moyen de 0,01 à 0,06 °C par décennie depuis 1979, alors même que les données SST montraient un réchauffement. Les auteurs ont recalculé les températures moyennes globales 1979-1999 en utilisant les données de température de l'air sur les périodes où elles étaient disponibles à la place des SST, et la tendance globale a été réduite de 0,05 °C par décennie.

L’affirmation du CRU que l’accord SST / MAT accord est «très bon», s'appuie sur Rayner et al. (2003). La section 5 de ce document a comparé les SST globales (HADISST) à trois jeux de données de température de l'air : un ensemble clairsemé provenant de navires sujet à quelques corrections de base (notée 42N), un appelé 43 N provenant du 42N révisé par ajustements pour tenir compte de l’augmentation des hauteurs moyennes des navires au cours du 20e siècle, et une version interpolée de 43N, lissée,et mélangée avec des données SST mesurées par satellite, afin d'obtenir une couverture mondiale complète, notée HadMAT1. Sur la moyenne à l'échelle mondiale, les tendances dans les quatre séries étaient presque identiques. Le cas de HadMAT1 est moins convaincant car il incorpore du SST dans sa construction. Dans les comparaisons limitées à des régions où les deux températures, celles de l'air (dans certains cas, de petites îles) et la SST étaient disponibles, un profil différent a été trouvé dans l'hémisphère sud, où la différence MAT SST baisse d'environ 0,2 °C au cours du 20ème siècle (Rayner et al. 2003
Figure 17). En d'autres termes, la SST réchauffe par rapport à la température de l'air correspondante. Il semble y avoir un effet similaire, mais plus faible dans les régions tropicales et également dans l'hémisphère nord (après 1980) . Malheureusement, l'information est présentée dans Rayner et al. (2003) sous la forme de petits graphiques dans laquelle l'échelle est grande par rapport à la taille de l'évolution, et aucune tendance numérique n’est fournie. Dans la conclusion de leur papier, ils disent (p. 22):

[Il y a] un petit refroidissement dans des NMAT par rapport aux SST dans l'hémisphère sud à partir du début des années 1990, qui n’est que partiellement atténué par les corrections de hauteur du pont, ce qui nécessite plus de recherches.

Cela ne rend pas justice à la preuve présentée dans leur figure 17, mais au moins cela pointe le fait que le problème constaté par Christy et al. existe et doit être approfondi.

3.6. Séries de données SST: le Centre Hadley

Le Centre Hadley produit deux séries de données : HADSST2 et HADISST. Leurs descriptions sont disponibles à www.hadobs.org.

HADSST2 part des données ICOADS, applique quelques corrections d’homogénéité, y compris l'ajustement Folland-Parker avec une élimination progressive légèrement plus longue (jusqu’en 1942) et les reporte dans les cellules d’une grille de 5 degrés, sans essayer d'interpoler les régions manquantes. Les méthodes sont présentées dans Rayner et al. (2006). Une caractéristique importante de HADSST2 est qu'ils ont changé les sources de données en 1998. Jusqu'en 1997 HADSST2 utilisé les données ICOADS, puis à partir de 1998 il utilise un sous-ensemble de ICOADS appelé Système d'observations marines en temps quasi-réel (NRT)(http://icoads.noaa.gov/nrt.html). Le site web ICOADS donne un bref, et quelque peu énigmatique, avertissement au sujet de la fusion des deux ensembles de données (souligné par l'auteur) :

Statistiques en temps quasi-réell basées sur NCEP GTS (produits limités, non complètement cohérent avec l'ICOADS, la production doit se terminer en Janvier
2011)(Http://icoads.noaa.gov/products.html).

Cela a incité le blogueur Bob Tisdale à comparer HadSST2 aux autres séries SST pour voir si il y a un discontinuité en 1998. Les graphiques suivants montrent la différence entre HADSST2 et les séries correspondantes utilisées par la NOAA (ERSST.v3b) et GISS (OI.v2). La NOAA utilise ICOADS d’un bout à l’autre ; le GISS passe également à un système automatisé en 1998, mais ne présente pas de changement radical. Une discontinuité relative de HADSST2 apparaît clairement lors de l’adoption du système NRT :

figrmk3-5

Figure 3-5: HADSST2 moins ERSST.v3b (à gauche) et moins SST OI.v2 (à droite).

Source : http://bobtisdale.blogspot.com/2009/12/met-office-prediction-climate-could.html

Comme indiqué plus haut, le système NRT sera abandonné à la fin de l'année 2010 puisque le système ICOADS est maintenant suffisamment automatisé pour permettre une mise à jour en continu, de sorte que le centre Hadley va probablement revenir à la source ICOADS. Il sera intéressant de voir s'il y a une discontinuité de la série HADSST2 début 2011.

HADISST livre une couverture globalement "complète", c’est à dire des valeurs pour chaque cellule de la grille, en utilisant une des deux méthodes d'interpolation. La principale source de données est la banque de données marines du britannique Met Office, complétée par des données ICOADS jusqu'en 1995. L'ajustement Folland-Parker est appliqué jusqu'en 1941.

1.  Marot | 29/09/2010 @ 16:35 Répondre à ce commentaire

Cet inventaire des sources et des incertitudes est remarquable.

Merci l’auteur et aux traducteurs.

2.  joletaxi | 1/10/2010 @ 16:53 Répondre à ce commentaire

Merci d’avoir traduit cet article.
Je vous rappelle que McIntyre semble porter de l’intérêt aux relevés de SST.
Cela risque de devenir passionnant,rien que ses premières constatations font augurer de quelques belles bagarres.(constatations qui corroborent celles de l’article)

3.  Marot | 3/10/2010 @ 12:15 Répondre à ce commentaire

Au plus j’avance dans la lecture, au plus je constate qu’il s’agit d’un article de fond très fouillé et documenté.
On y apprend ce qu’était le « blip » dont les courriels du climategate parlaient longuement :
je corrige, je ne corrige pas ? peut-être 0,15°C cela aurait des avantages…
Évidemment tout cela sans aucune justification, simplement pour masquer un phénomène dérangeant.
Comme le dit l’auteur

modifications importantes et arbitraires à la série mondiale SST… qui peuvent toutes changer fondamentalement l’image du réchauffement du milieu du siècle et peut-être créer de nouvelles divergences avec les modèles climatiques.

C’est à noter comme autre exemple du n’importe quoi ascientifique.

On savait que les données de températures terrestres étaient considérablement trafiquées.
On sait maintenant le peu de confiance à accorder aux SST.
Je n’ose pas imaginer ce qu’il en est des pressions et des précipitations.
Quant aux proxies, l’immunisation date de 1998 et les piqures de rappel par les Briffa ont fait leur effet.

Bref tout foire par les capteurs.
On ne sait pas ce qui s’est passé et on prétend dévoiler l’avenir.

Tas d’orgueilleux.

4.  Murps | 4/10/2010 @ 16:19 Répondre à ce commentaire

Marot (#3), oui, c’est bien ma perception de la « climatologie » actuelle : la conviction personnelle remplace la démarche habituelle basée sur la reproductibilité et la réfutabilité…

Ensuite, tout est affaire de présentation « cosmétique » des données.

Il n’y a plus qu’à attendre que tout ce fatras de « science post-moderne » vole en éclat.

5.  mica | 4/10/2010 @ 18:39 Répondre à ce commentaire

aucun rapport mais bon…

lien

6.  henir33 | 4/10/2010 @ 20:28 Répondre à ce commentaire

notons que dans ses conférence de l’automne 2009 Vincent Courtillot avait pointé le fait que :

1 les mesures de la SST pour le XiX et la première moitié du XX ème siècle étaient sujettes à incertitudes: faibles nombres de prélèvements, méthodes (seaux, circuits de refroidissement …), larges zones peu ou pas couvertes

2 alors que l’incertirtude sur les historiques des températures de la surface des mers selon les rapports du GIEC est inférieure à celle des mesures terrestres !!!!

il en concluait sobrement que le réchgauffement depuis 1850 est à mesurer avec porudence eu égard au fait que les océans couvrent les 2/3 de la surface du globe.

cet article complète remarquablement le panorama

7.  PapyJako | 10/10/2010 @ 7:59 Répondre à ce commentaire

Marot (#3),

C’est à noter comme autre exemple du n’importe quoi ascientifique.

Et vous n’avez pas encore tout vu !… J’ai déja transmis la traduction de la section 4, qui devrait paraïtre sous peu, et j’ai en cours celle de la section 5, celle des conclusions …

henir33 (#6),

notons que dans ses conférence de l’automne 2009 Vincent Courtillot avait pointé le fait que :

Vincent Courtillot est un grand !…, il a immédiatement pointé l’essentiel : les mesures sont de trop mauvaise qualité pour qu’on puisse leur faire dire quoi que ce soit, sauf bien sûr sous la torture !

8.  Araucan | 25/10/2010 @ 23:29 Répondre à ce commentaire

Pour ceux qui ont un peu de temps de devant eux et la passion de la navigation … histoire de rechercher les données de température des eaux de surface …
http://fr.news.yahoo.com/68/20.....aaa9b.html

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