Economie du changement climatique./1

NB : les acronymes sont en fin de billet.

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1. Introduction

Avec le développement de méthodes telles que la préférence indiquée, le coût de transport, les transferts de bénéfices et d’autres techniques qui n’exigent pas une compréhension complète des aspects de la science physique dans l’évaluation des avantages environnementaux, l’économie environnementale a eu tendance à porter moins d’attention à ces aspects. Mais cette tendance a amené certains problèmes aussi bien que certains avantages aux économistes de l’environnement. Ces problèmes sont particulièrement importants dans le cas des analyses économiques de problèmes multidisciplinaires tels que le changement climatique. Les analyses économiques de la gestion de l’environnement et d’autres problèmes de politique publique seraient bien plus utiles si elles étudiaient d’un œil critique ce que les autres disciplines ont à dire, si elles exigeaient d’utiliser les données d’observation et les méthodes scientifiques les plus pertinentes, et prenaient en considération des alternatives moins coûteuses pour les changements proposés. Ces principes généraux sont particulièrement illustrés dans leur application au cas de la lutte contre le changement climatique, un des problèmes de politique publique mettant en jeu le plus de disciplines différentes, et en montrant à quel point ces principes amènent à des conclusions quelque peu différentes de celles de la plupart des analyses économiques antérieures. C’est probablement le cas pour des problèmes multidisciplinaires de politique publique autres que le changement climatique.
Il ne fait pas de doute que les propositions de lutte contre la menace de changement climatique, quelquefois appelé changement climatique anthropique catastrophique (CAGW) ou réchauffement global, ont présenté une économie de l’environnement avec le défi le plus important aujourd’hui pour fournir des avis profitables sur ce qui devrait être fait concernant ce qui est peut-être le problème de politique publique environnementale majeur de ce dix dernières années au moins. Les conséquences économiques des principales propositions pour lutter contre le changement climatique sont importantes. Il n’y a actuellement, je pense, aucun problème de politique publique ayant un tel impact économique sur lequel les économistes de l’environnement aient des compétences particulières et par conséquent quelque chose d’utile à dire. Le but de cet article est d’évaluer si ces efforts seraient plus efficaces si les économistes utilisaient ces principes.
Cet article fait suite à des discussions personnelles avec deux des principaux analystes économiques à propos de la validité des données scientifiques qu’ils ont utilisées. L’un déclarait qu’il n’avait jamais examiné les données scientifiques qu’il tenait du GIEC car il pensait qu’elles étaient valides. L’autre déclarait qu’il devait y avoir une division du travail et que sa compétence n’étant pas d’ordre scientifique ceci devait être laissé aux experts de ce domaine, parmi lesquels il comptait le GIEC.

1.1 Utilisation des données les plus pertinentes et de la Méthode Scientifique pour déterminer les effets.

Je pense raisonnablement que cet article considèrera que le critère d’affirmation ou de soutien d’une hypothèse est de savoir s’il se fonde sur des observations d’essais pertinents ou sur la méthode scientifique. Si l’affirmation ou l’hypothèse n’est pas étayée ainsi, cela signifie qu’elle n’est pas appuyée par les données du monde réel car le rôle des observations d’essais pertinents et de la méthode scientifique est de garantir que les affirmations et hypothèses correspondent effectivement à la réalité. Suivant cette voie, les affirmations de prétendus faits, de revendications issues de modèles et d’arguments contestables (lorsque les auteurs écartent toute explication alternative pour leurs conclusions) ne sont pas prises en considération. Cela diffère sensiblement de la plupart des recherches scientifiques et économiques sur le changement climatique, mais pour une bonne raison.
Il importe que l’économie de l’environnement soit basée sur de la science valide et non sur des conjectures ou de la croyance religieuse si elle doit constituer un guide fiable pour la décision politique. Il n’y a pas d’autre moyen d’établir des fondements solides pour l’économie de l’environnement correspondant mieux au monde réel que les modes du jour.
Conformément à ma définition de la science valide du paragraphe 1.2, il importe pour les économistes de tenter d’identifier clairement si les conclusions scientifiques sont étayées par des observations et l’application de la méthode scientifique ou non. Celles qui ne sont pas étayées par des données d’observation du monde réel ou la méthode scientifique sont, à mon avis, bien identifiables en tant que calculs hypothétiques à ne pas confondre avec des conclusions scientifiques. Bien que de telles analyses hypothétiques puissent jouer un rôle important dans certains cas, elles doivent être soigneusement distinguées de conclusions d’application plus générales. Cela comprend des conclusions endossées par des académies scientifiques nationales, des sociétés scientifiques, la révision par les pairs, les résultats de modèles, ou les organismes gouvernementaux. Naturellement, les effets hypothétiques sont souvent utiles à l’analyse, mais il est vital que les économistes présentent des avis crédibles  aux décideurs politiques de façon à ce que toute conclusion issue de telles affirmations et hypothèses soient clairement étiquetées comme n’étant pas scientifiquement vérifiées afin que l’utilisateur de ces conclusions garde cela à l’esprit. Une approche similaire est nécessaire dans les cas où il n’y a pas suffisamment de preuves pour déterminer si les suppositions ou les hypothèses sont de la science valide.

1.2 Pourquoi la science doit être fondée sur des données d’observation pertinentes et la méthode scientifique.

Il est très important de comprendre ce qu’est la science valide. La science valide telle qu’utilisée ici est le résultat de l’utilisation des données d’observations les plus pertinentes et de la méthode scientifique pour comprendre le monde et ses habitants. Pour un résultat probant, on doit considérer la fiabilité des données d’observations. L’essentiel de la méthode scientifique consiste à caractériser l’objet de l’enquête, construire une explication théorique et hypothétique des caractérisations, faire des prédictions basées sur l’hypothèse, et finalement déterminer expérimentalement la validité de ces prédictions en les comparant aux données du monde réel. Pour être valides les résultats doivent être reproductibles et vérifiables par des entités indépendantes. Les suppositions et les hypothèses étudiées dans cet article proviennent des divers rapports du GIEC concernant le changement climatique, leur reformulation raisonnable ou leur interprétation par des économistes préparant des estimations des avantages.La vraie science ne consiste pas  à faire une description du monde et des opinions des autorités mondiales sur un sujet particulier. La vraie science n’est pas l’affirmation d’une croyance par des organisations scientifiques. La question n’est pas ce que pense quelqu’un, mais si ce qu’il ou elle croit correspond aux données d’observations les plus pertinentes et à la méthode scientifique. Il est important de noter que la science évolue dans le temps car de nouvelles découvertes sont faites et de nouvelles hypothèses sont formulées puis rejetées. Seule la recherche continue peut garantir que de nouveaux résultats deviennent disponibles. Richard Feynman [1] l’exprimait ainsi :"En général, nous envisageons une nouvelle loi selon le processus suivant. D’abord nous la pressentons. Puis nous calculons les conséquences de l’intuition pour voir ce qu’il en serait si cette loi à laquelle nous avons pensé était vraie. Puis nous comparons le résultat des calculs à la nature, par l’expérimentation ou l’expérience ; nous le comparons directement aux observations pour voir si cela marche. Si cela diverge de l’expérimentation, c’est que c’est faux. C’est cette simple affirmation qui est la clé de la science. La beauté de votre intuition ne fait aucune différence. Votre élégance, le nom de celui qui a eu l’intuition ne font rien à l’affaire – si cela diverge avec l’expérimentation (observation), c’est que c’est faux."Selon la méthode scientifique, une hypothèse scientifique devrait être évaluée en comparant les données du monde réel avec les implications de l’hypothèse. C’est comme cela que les idées d’Albert Einstein sur la relativité furent finalement acceptées. Nombre de scientifiques doutaient de son hypothèse et proposèrent continuellement des essais réalistes de celle-ci. Mais chaque essai confirmait sa validité ou s’avérait être basé sur des données ou des analyses incorrectes. Après un certain nombre de ces essais, l’opposition concéda que son hypothèse était valide. Ce processus est décrit dans Crelinsten [2]. On a besoin du même processus pour les hypothèses sur le changement climatique.
Des approches alternatives ont été proposées pour l’utilisation de la méthode scientifique pour déterminer la validité scientifique. Un exemple est proposé par Armstrong & Green [3] (NdT. Voir aussi des mêmes auteurs « Warm Audit 31 » traduit pour Skyfall). Leur approche plus vaste comprend nombre des attributs de la méthode scientifique décrite plus haut, et parvient aux mêmes conclusions que la présente étude sur la validité (ou son absence) de la majorité de la recherche actuelle sur le changement climatique, mais laisse nettement moins de place à l’utilisation des données d’observations et de la validité des hypothèses.

1.  pastilleverte | 19/09/2011 @ 10:32 Répondre à ce commentaire

Quand je lis le mot géoingénierie, comme solution « la moins pire » aux « problèmes » (???) du RCA, je crie : STOP !
Qu’est ce que c’est que ces c… ?
Porte ouverte aux Geo (c’est le cas de le dire) Trouvetout et autres Dr Frankenstein.
Sans compter de possibles collusions avec certaçins lobbies économico-politiques (industrie spatiale ?)
Cette histoire de RCA a bien été lancée en partie par des pro-Nuke (pas de CO2 à la production d’électricité).
Mais sacrebleu, laissez donc faire la Nature, en l’encadrant et en évitant de trop la bousculer !

2.  scaletrans | 19/09/2011 @ 11:02 Répondre à ce commentaire

pastilleverte (#1),

J’adhère totalement ! Ce passage m’avait choqué lors de la traduction, mais je n’ai pas voulu y mettre mon grain de sel…

3.  Mihai V | 19/09/2011 @ 13:29 Répondre à ce commentaire

Excellente traduction.
Juste deux petites suggestions de correction de Laure Tograff :

Page 1, Résumé, fin du premier paragraphe :
comme nos nous allons le voir :

Page 3, au point 1.2.2 :
Si le risque de tels changements est élevé ainsi que le coût d’un changement de politique, la meilleure approche est normalement de ne rien faire jusqu’à ce que la science soit mieux établie ou que les coûts s’abaissent.

4.  pastilleverte | 19/09/2011 @ 19:38 Répondre à ce commentaire

@ scaletrans : et c’est tout à votre honneur.
Que ce « bug » ne vienne pas casser la discussion sur ce sujet !

5.  Nicias | 20/09/2011 @ 13:28 Répondre à ce commentaire

Ouch le début est franchement dur a traduire et incompréhensible pour un non initié à l’économie environnementale, ce que je ne suis pas donc pas sur que j’ai bien compris ce que j’ai lu:

préférence indiquée (stated preference), méthode des préférences déclarées.
Concrètement dans notre cas cela consiste a faire un sondage pour demander aux agents économiques s »ils préfèrent une incitation fiscale pour poser une éolienne dans leur jardin ou pour peindre leur toit en blanc (aka géoingénierie, change l’albédo de la terre).

le coût de transport (cost transport): méthode des coûts de déplacement. Je n’ai pas très bien compris faute de source spécifique sur le sujet. Je ne sais pas en quoi consiste la méthode (pas le temps de chercher) mais le problème semble être que l’agent économique ne fait pas les bons choix (analyse coût/bénéfices) faute d’informations sur la congestion de la route qu’il va prendre ou la météo du lieu ou il part bronzer.

les transferts de bénéfices (benefits transfer): La méthode d’évaluation contingente consiste à déterminer les bénéfices d’une politique en l’estimant à partir de cas existant dans un autre contexte.

6.  Araucan | 20/09/2011 @ 14:06 Répondre à ce commentaire

Nicias (#5),

Sur les coûts de transport, (pas mes sources sous la main non plus, il s’agit d’évaluer le consentement à payer par rapport au déplacement à faire …

7.  Araucan | 20/09/2011 @ 14:10 Répondre à ce commentaire

Nicias (#5),

En complément ,

Comme nous venons de le voir, l’attribution d’une valeur aux composantes environnementales est fondamentale mais complexe. Plusieurs méthodes sont utilisées pour le faire :

méthode des coûts de transport ou de déplacement
quelle distance sont prêts à parcourir les individus pour profiter d’un paysage, ou d’un objet (les scarabées, par exemple) ? On mesure le coût de transport réellement dépensé par des individus pour venir à tel ou tel endroit.
méthode des prix hédonistes
on observe les sommes que consacrent les individus pour obtenir tel ou tel avantage environnemental ; cette méthode s’applique surtout sur les biens immobiliers où elle revient à calculer le sur-coût que représente un beau paysage ou un air « pur »
méthode d’évaluation des dépenses de protection
combien sont prêts à payer les individus pour ne plus subir une atteinte environnementale (exemple : coût d’un déménagement pour ne plus subir une pollution, un bruit par exemple) ?
méthode de valuation contingente
à la différence, des méthodes précédentes, l’évaluation consiste à questionner plus qu’à observer. Dans les trois méthodes précédentes, on observe le coût de transport, le surcoût environnemental ou les dépenses de protection : ce sont des sommes d’argent que les individus dépensent effectivement. L’évaluation contingente consiste à questionner les individus dans le cadre d’enquête.

http://fr.wikipedia.org/wiki/%.....ironnement

8.  Nicias | 20/09/2011 @ 15:24 Répondre à ce commentaire

Araucan (#7),

Merci !
J’ai écrit au moins une belle connerie: La méthode de transfert de bénéfice n’est pas la méthode d’évaluation contingente, mais par contre peut en être le substitut.
La méthode d’évaluation contingente étant une des méthodes des préférences déclarées.
Ce qu’il faut retenir, c’est qu’on bénéficie d’un transfert d’information et non d’argent directement.

A me relire, je ressemble à un attaché de presse journaliste écolo qui pond un article en trois minutes sur la fonte de la banquise en mer morte.

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