Dans d’atroces souffrances …

Voici le communiqué de presse de l'Agence de l'eau Rhône-Méditerranée-Corse suite au séminaire qu'elle organisait sur Eau et changement climatique le 19/09 dernier. Voilà le rapport, des vidéos et présentations, des interventions pour des discussions plus détaillées … En prime l'article du Monde. Je me demande ce qu'aurait été le programme de travail pour les années à venir de l'Agence de l'eau concernée s'il n'y avait pas le RCA pour motiver les décideurs à différents étages. Mais bon, le fantastique est à la mode et les modèles climatiques y participent, sachant que le postulat de base reste comme suit : s'il fait plus chaud, alors ce sera plus sec. Et que le réchauffement constaté des eaux du fleuve vient déjà en grande partie du nucléaire. J'ai comme idée que les piranhas sont déjà en place.

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Moins de neige, une eau plus rare et aléatoire, des rivières plus basses en été : les nouvelles données du changement climatique obligent à repenser la gestion de l’eau.

L’Agence de l’eau publie ce jour un rapport de synthèse des connaissances sur les impacts du changement climatique sur l’eau dans le grand Sud-Est français (Rhône-Méditerranée et Corse) et a réuni un séminaire scientifique de 300 experts et gestionnaires de l’eau et des rivières, des collectivités et de l’Etat. Région la plus sensible de France au changement climatique, elle connaît déjà des situations de pénuries d’eau sur 40% de son territoire, d’où l’urgence d’envisager des mesures d’adaptation ambitieuses.
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>> 1. Les faits les plus marquants pour ces territoires seraient, selon les scientifiques :
  • • Une perte de durée d’enneigement de moitié au sud des Alpes dès 2030, due à la conjonction de la diminution des chutes de neige et une accélération de leur fonte. C’est à basses et moyennes altitudes (1200 à 1800m), dans toutes les Alpes, que le manteau neigeux sera le plus dérangé. A plus long terme (2080), un scénario pessimiste fait état d’une quasi-disparition de la neige au printemps sur toutes les Alpes à basse et moyenne altitude.
  • • Le débit des rivières en été chutera parce qu’il ne sera plus aussi bien soutenu par la longue fonte des neiges et que les sols seront plus secs. En 2050, les affluents non méditerranéens du Rhône (Saône, Loue, Ognon…) perdraient 20 à 50% d’eau en été et en automne, et jusqu'à 75% en été pour l’Isère et la Durance. Les fleuves du Languedoc Roussillon pourraient perdre 30 à 80% de débit en 2080.
  • • La Méditerranée sera la zone la plus affectée par les pertes de précipitations. Les bassins côtiers du Languedoc Roussillon recevraient 60 % de pluies en moins l’été en 2080 avec des déficits majeurs jusqu’à -80 % sur l’Agly, l’Aude, la Têt ou le Tech (Aude et Pyrénées-Orientales). Des sécheresses plus intenses, plus longues et plus fréquentes sont attendues partout. Pour les pluies d’automne et d’hiver, les modèles scientifiques ne s’accordent pas sur l’évolution à la baisse ou à l’augmentation. Néanmoins, en bilan sur l’année, les apports d’eau seront plus faibles et plus incertains.
  • • Facteur aggravant, l’évapotranspiration s’accroissant, elle avancera en saison les manques d’eau en agriculture et les accentuera par assèchement des sols. A l’échelle du bassin Rhône-Méditerranée et Corse, les scientifiques situent la montée des températures en moyenne annuelle entre 1 et 2°C d’ici 2030 puis de 3 à 6 °C à l’horizon 2080. Plus précisément, sur les bassins côtiers les scénarios optimistes annoncent +3°C d’augmentation moyenne d’ici 2080. Une pointe à +10°C au mois d’août est même envisagée. Les aquifères littoraux, affectés par une baisse de la recharge, pourraient être aussi menacés de salinisation due à l’élévation du niveau de la mer. En effet, il est vraisemblable que la Méditerranée montera sans qu’il soit encore possible préciser de quelle hauteur.
  • • Les poissons d’eau douce et d’eau de mer seront fortement perturbés. En 30 ans, les eaux du Rhône se sont déjà réchauffées de 2°C à son embouchure en été. Seules les cours d’eau comme l’Isère, l’Arve ou le Rhône amont pourraient être moins touchés du fait de l’influence des glaciers, tant qu’ils fondent. Les aires de répartition des poissons vont se déplacer vers le nord et en altitude. La truite fario et le chabot, notamment, verraient leur aire régresser sévèrement.  La Méditerranée pourrait se réchauffer de 3°C d’ici 2080 et s’acidifiera (pH tombant de 8,1 actuellement à 7,7 en 2100 par dilution de CO2, ce qui représente une menace pour le calcaire des coquilles). Sur 75 espèces de poissons endémiques, 50 verraient leurs habitats fragmentés ou réduits et 14 disparaitront probablement. Enfin, le littoral languedocien connaîtra des risques d’érosion et de submersion encore accrus (NdA : ????).

Ces données impressionnantes par leur rapidité font sentir la vulnérabilité de nos activités actuelles de sports d’hiver de moyenne montagne, de refroidissement industriel sur le cours du Rhône (nucléaire), d’agriculture, d’approvisionnement en eau potable et bien sûr de survie des milieux aquatiques, si rien n’est fait.

>> 2. Ces travaux s’inscrivent dans le cadre d’un futur plan de bassin d’adaptation au changement climatique que l’agence de l’eau pilote, avec l’Etat et les 5 conseils régionaux de la zone, et qui sera finalisé mi 2013. Le rapport scientifique publié ce jour est soumis à consultation scientifique pendant un mois. En particulier, un comité scientifique spécial est réuni par l’agence de l’eau. Placé sous la présidence de Hervé Le Treut, directeur de l’Institut Pierre-Simon Laplace, il donnera son avis sur ces conclusions et formulera des recommandations pour guider les gestionnaires dans la mise en place de mesures d’adaptation à la hauteur de l’enjeu.

Ensuite, fin 2012, le plan présentera 4 cartes de vulnérabilités identifiant les zones les plus sensibles pour l’agriculture (vigne, tournesol au sud, maïs…), la ressource en eau, les activités liées à la neige et la biodiversité. Elles croiseront les données de fragilités déjà perceptibles dans nos territoires et les évolutions climatiques estimées. Enfin le plan comprendra des mesures d’adaptation pour les bassins des principaux cours d’eau et servira de module réplicable dans tous les plans régionaux en cours de préparation (SRCAE, SRCE, SRADT…).
Ce plan est placé sous la responsabilité d’un comité directeur comptant le président du comité de bassin Rhône-Méditerranée, le préfet coordonnateur de bassin et les 5 présidents de conseils régionaux (Provence Alpes Côte d’Azur, Languedoc-Roussillon, Rhône-Alpes, Franche-Comté, Bourgogne). L’agence de l’eau appelle à une forte implication des élus, avec l’Etat, pour ce travail de réinvention de l’avenir de l’agriculture, du tourisme, de l’urbanisation, de l’énergie et des milieux aquatiques.
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Absence de neige au printemps, des sécheresses
sévères en été : les cours d'eau n'échappent pas au réchauffement climatique. Le Rhône a ainsi vu sa température grimper de 2 0C à son aval depuis 1977. Cet accès de fièvre atteint 3 0C par endroits lors des saisons les plus chaudes. Des chiffres qui ont conduit l'Agence de l'eau Rhône-Méditerranée et Corse à lancer l'alerte. Le plus puissant fleuve de France a beau atteindre un débit de 1700 m3 par seconde à son embouchure, il pourrait connaître des étiages catastrophiques.

Il va donc falloir apprendre à le ménager. L'Agence prépare pour 2013 un plan d'adaptation au changement climatique pour le bassin du Rhône et ses affluents. Cinq régions sont concernées, depuis la Franche-Comté où coule la Saône, à la Provence-Alpes-Côte d'Azur. Or 40 % de ces territoires connaissent déjà des situations de pénuries d'eau.

L'Agence de l'eau a collecté et synthétisé une série d'études scientifiques, en particulier les projections basées sur les scénarios du Groupement d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat (GIEC). Si la question du volume des précipitations à venir reste en débat, pour le reste, les résultats très inquiétants convergent.

Le Rhône, que viennent gonfler au printemps ses affluents de montagne, va subir de plein fouet les modifications du climat dans les Alpes. La neige va tomber en couche moins épaisse, fondre plus tôt et céder sa place à la pluie. Le fleuve devrait en conséquence connaître des crues sévères à la fin de l'hiver et de longues périodes de sécheresse jusqu'à l'automne.

"UNE PORTÉE CONSIDÉRABLE SUR NOS USAGES DE L'EAU"

Plusieurs modèles envisagent, à l'horizon 2030, une diminution de 20 % à 50 % de la durée annuelle d'enneigement dans les Alpes du Sud à 1 800 mètres d'altitude ; de 10 % à 15 % dans le nord du massif. A 1 200 mètres, c'est pire. Les débits de l'Isère, de la Durance et du Rhône pourraient donc rapidement et fortement chuter.

" Ce sont des informations dérangeantes qui vont avoir une portée considérable sur nos usages de l'eau, insiste Martin Guespereau, directeur de l'Agence de l'eau. Nous avons besoin de fondements scientifiques robustes pour faire accepter l'idée, neuve en France, qu'un partage s'impose." Entre autres travaux de recherche, ses services
financent une étude de la thermie du Rhône menée par EDF. L'électricien est intéressé au premier chef car il puise dans le fleuve l'eau nécessaire au refroidissement de ses centrales nucléaires et doit mesurer en aval l'impact de ce que celles-ci rejettent.

Depuis les années 1970, EDF ausculte donc le Rhône toutes les heures grâce à quinze stations. Ses observations confirment que le Rhône se réchauffe. La température du fleuve passe en moyenne de 10,9 0C à la frontière suisse à 14,1 0C à Aramon dans le Gard. Et a gagné 2 0C en trente ans en aval. En amont, les stations ont enregistré des variations de 0,5 à 1,6 0C en moyenne selon les endroits entre 1977 et 2003.

"L'été 1976 mis à part, il y a une homogénéité de la période qui précède 1987, observe Alain Poirel, ingénieur expert en environnement aquatique au sein d'EDF. Depuis, il n'y a jamais plus eu d'année froide. L'eau qui sort du lac Léman est passée de 20 0C à 23 0C en été. Elle a atteint 27 0C lors de la canicule de 2003. A ce stade, les salmonidés sont cuits !"

UN BOULEVERSEMENT DES ÉCOSYSTÈMES

Au-delà de 28 0C, les centrales nucléaires ne sont plus autorisées à puiser dans le Rhône. En 2003, plusieurs ont dû revoir leur activité à la baisse et même s'arrêter. Afin d'éviter une pénurie d'électricité, la centrale du Tricastin avait obtenu une dérogation. Par leurs rejets, les installations nucléaires contribuent à élever la température du fleuve de 1,5 ºC à 3,10 ºC.

Cette hausse des températures conduit à un bouleversement des écosystèmes. Pour un réchauffement de 1,50 ºC, truites et chabots, par exemple, devraient diminuer dans le Haut-Rhône, tandis que chevesnes, ablettes, perches, hotus, barbeaux pourraient prospérer. De nombreuses espèces ont commencé à migrer vers le Nord.

Le réchauffement de l'eau, l'affaiblissement des débits vont aussi avoir des répercussions sur l'ensemble du bassin rhodanien. Nappes souterraines en baisse et pollutions moins diluées vont affecter la qualité et la quantité d'eau disponible. Sur le littoral méditerranéen, l'impact pourrait être plus spectaculaire encore avec une érosion accélérée et des risques d'assèchement des zones humides.

"L'été dernier, en Camargue, le sel est remonté jusqu'à Arles, des rizières ont été grillées", rapporte Martin Guespereau.

De l'Ain à la Provence, tandis que les sols perdent de leur humidité avec l'augmentation des températures, les organisations d'agriculteurs réclament de pouvoir pomper et stocker l'eau du Rhône pour irriguer. "L'apparition de conflits d'usages est très probable", conclut l'Agence de l'eau.

(NdA : Bon, maintenant vous savez où aller passer votre retraite !)

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51.  scaletrans | 13/10/2012 @ 11:23 Répondre à ce commentaire

Bousquet de Rouvex (#50),

Plutôt frustrant vous voulez dire…