Le sol est un milieu géologique dont le faciès est contrôlé par l’environnement et par le climat. Au cours des millénaires ces différents faciès se succèdent tout en évoluant plus ou moins progressivement. L’étude des séquences pédologiques enregistrées est l’un des outils utilisés pour la reconstitution des conditions climatiques anciennes. L’évolution du pergélisol (état du sol souvent associé aux périodes froides) permet, grâce à son impact dans le sol, de suivre l’extension du climat arctique en Europe non-englacée, en particulier au cours du dernier maximum d’extension des calottes glaciaires
Figure 1 : comparaison de l'extension du pergélisol aux différentes périodes de l'holocène
A noter l'étendue du dégel lors de l'Optimum Holocène (-8.000 ans) par rapport à aujourd'hui
Le pergélisol
Le pergélisol est la partie du sol situé sous la surface qui ne dégèle pas pendant au moins 2 années consécutives. Il enregistre le déficit thermique climatique sur une durée longue (103 ans) avec une accumulation de glace de ségrégation, sous forme d’un feuilletage de lentilles centimétriques, surtout dans les premiers 10 m du sol. Il sert de plancher estival aux eaux superficielles.
Son extension actuelle
Le pergélisol actuel s’étend à basse altitude entre 57°N sur les façades orientales de continent et 70°N sur les façades occidentales (figure 1, droite). Son épaisseur varie de la vingtaine de mètres dans son extension méridionale pour atteindre 300m dans les zones déglacées au Tardiglaciaire–Holocène et plus de 600m dans les secteurs hypercontinentaux non-englacés au Quaternaire (Sibérie). Le record est détenu par les Monts de Verkoyansk, à l’Est de la Sibérie avec plus de 1000m de profondeur.
Le pergélisol actuel des régions arctiques et des latitudes moyennes
Le pergélisol arctique est vieux, fort probablement miocène final (7-5 Ma) selon les auteurs russes. Son inertie thermique l’a fait résister en profondeur, aussi bien au réchauffement du Pliocène inférieur qu’au plus chaud des interglaciaires du Quaternaire récent. Son extension au cours des temps géologiques est régie aux hautes latitudes par les mêmes paramètres que les glaciations, c’est-à-dire la massivité des continents, les paramètres orbitaux (l’obliquité, excentricité et précession) et les baisses eustatiques.
Aux latitudes moyennes, le pergélisol s’installe généralement en même temps qu’un déficit estival de l’insolation contrôlé par la précession sans être obligatoirement lié aux grandes extensions des inlandsis. Son apparition est un phénomène récent, rare avant 1 Ma, il apparaît surtout pendant les stades isotopiques 12, 10, 8 et 3-4.
L’évolution du pergélisol entre glaciaires et interglaciaires
A l’échelle mondiale, l’extension du pergélisol au dernier maximum glaciaire (LGM) atteignait à basse altitude 44°N en moyenne (figure 1, gauche). Lors de l’Optimum Holocène, elle était réduite à 55°N (Nord du Québec) – 50°N (Bering) à l’Est des continents, et à 65°N-70°N sur les façades occidentales.
Son extension maximale, lors des épisodes les plus froids du Quaternaire Moyen n’a pas été beaucoup plus grande que celle du LGM, ceci en relation avec la configuration des masses continentales pendant cette partie du Quaternaire.
L’évolution au cours de l’Holocène
Consécutivement à la baisse de l’insolation estivale au cours de l’Holocène, l’extension actuelle du pergélisol vers le Sud atteint environ un 1/3 de son extension du LGM (figure 1, droite).
Impact du pergélisol sur le fonctionnement hydrologique du sous-sol
La présence d’un pergélisol au plus froid des glaciations dans nos régions a, autant que les glaciers, un impact sur le fonctionnement hydrologique du sous-sol. Les fluides migrent généralement du sous-sol vers les secteurs les plus froids de cet horizon, c’est-à-dire vers 10-20 m de profondeur, la limite d’enregistrement des fluctuations thermiques annuelles. Ceci explique l’intérêt, notamment de l’ANDRA, pour les reconstitutions de son extension spatiale en Europe occidentale et surtout pour la modélisation de sa profondeur de pénétration. La figure obtenue à partir du modèle Gelsol du LCPC en collaboration avec le CNRS et le BRGM en est un bon exemple.
La limite inférieure du pergélisol est en équilibre avec les fluctuations climatiques à long terme (103 ans) du climat et le gradient géothermique local; il s’agit plutôt d’une limite thermique théorique en raison de l’absence de modification des roches en carotte, la pression limitant la cristallisation de glace en profondeur. La néotectonique est susceptible de perturber cet enregistrement.
…
L’évolution du pergélisol lors de la dernière glaciation
Le pergélisol a recouvert en deux étapes une bonne part du territoire français pendant la dernière glaciation, la première étant comprise entre 60 et 32 ka, la seconde effective à partir de 27 ka. Il est resté surtout discontinu le long de la façade atlantique en raison du volant thermique joué par l’océan Atlantique et des précipitations plus abondantes. Par contre, la Manche orientale, émergée relativement tôt a été envahie par un pergélisol continu. En altitude et sur l’essentiel du bassin parisien et du nord de la France, le pergélisol a été précocement continu et de ce fait, très épais lors du LMG. Dans le S et le SE de la France. La présence du pergélisol a permis, malgré l’aridité régionale, le maintien d’une végétation arbustive à arborée, à l’instar de la Yakoutie actuelle, suffisante pour le maintien de grandes faunes. Le pergélisol disparaît définitivement en plaine lors du réchauffement du Bölling (13 ka), avec la première apparition des forêts de bouleaux dans le Nord.
Enjeu de l’étude du pergélisol et prospective
L’étude du pergélisol est un enjeu international, en raison de la surface affectée par ce phénomène dans l’hémisphère nord en Amérique et surtout en Sibérie, mais également dans les zones de montagne tempérées : environ 25 millions de km2, soit de l’ordre de 25% des terres émergées rien que pour cet hémisphère ! C’est une zone très sensible en cas de réchauffement climatique en raison non seulement des quantités de glace stockées dans le sous-sol, mais également celles de méthane sous forme d’hydrates gazeux ou celles de tourbes susceptibles d’être biodégradées en cas de disparition du pergélisol. C’est également une zone clef d’un point de vue biodiversité en raison de la préservation de souches anciennes de bactéries dans le pergélisol tertiaire de Sibérie. Un réchauffement climatique libérerait une surface agricole non-négligeable pour l’humanité, mais modifierait également de manière considérable l’hydrologie de l’hémisphère nord. Ceci dit, le pergélisol est un “ dur à cuire ” et le réchauffement actuel sensible surtout en milieu hypercontinental ne l’affecte que superficiellement ; au contraire, il s’épaissit dans le secteur péri-atlantique Nord, comme le montre la croissance des coins de glace, ce qui est bien reflété par la modélisation climatique présentée par H. Le Treut. Par contre, à l’inverse, en Yakoutie, l’essentiel de la fonte du pergélisol est d’origine anthropique régionale et est lié au défrichement forestier : Les Yakoutes, embourbés par cette dégradation importante du pergélisol, alias le thermokarst, rêvent d’un nouveau Petit Age Glaciaire…
Une coordination des recherches est assurée par l’Association Internationale du Pergélisol (IPA) (www.soton.ac.uk/ipa) avec un certain nombre de programmes à visée climatique tels que ITEX, CALM, PACE et surtout le Global Geocryological Database (nsidc@kryos.colorado.edu). Des cartes de la répartition actuelle du pergélisol et des cryosols peuvent être obtenues à l’US Geological Survey
(ftp://ftp.ngdc.noaa.gov/Snow_Ice/permafrost/IPA_map/).
En France, ces études ont été supportées en partie par les financements de GDR dans le cadre du CNRS, de l’INSU-CNRS et de l'IFRTP.
20 réponses à “Extension du pergélisol en Europe au dernier Maximum glaciaire (20 ka BP)”
La (Figure 1) présente des lacunes, notamment la légende qui ne rend pas compte de l’ensemble du contenu de la carte, et des imprécisions qui ne sont pas seulement dues à l’échelle trop petite. On ne peut pas lire la signification de la couleur jaune pale, on ne sais pas non plus celle turquoise… L’extension du « gel saisonnier profond » vers le domaine méditerranéen, notamment l’Espagne méridionale et une bonne partie de l’Afrique du Nord est une exagération pour la période actuelle (aujourd’hui). Les conditions périglaciaires ne sont pas actuellement si étendues pour avoir un pergélisol ou un mollisol en Afrique du Nord. Certaines parties élevées de la chaine atlasique (du Maroc à la Tunisie) peuvent en effet subir un gel saisonnier mais pas vraiment profond… d’autant plus que la continentalité qui se conjugue avec le voisinage d’un désert chaud rend le phénomène surtout épisodique, voire éphémère. La forte amplitude thermique diurne ne permet la persistance du gel que sur des sommets et des versants privilégiés (exposition et altitude) dont la faible extension ne permet pas une véritable représentation sur une telle carte. Un éventuel réchauffement climatique, tel que l’actuel s’il se confirme, ne signifiera qu’une tendance au retour à des ambiances holocènes; un retour naturel depuis le Petit Age Glaciaire alors que son amplification localisée par les actions anthropiques reste toujours à démontrer…
Bien entendu ce résultat n’a aucune valeur en raison de l’inutilité des modèles climatiques..
@ DM
Ni plus, ni moins, il est un des éléments à intégrer.
Le problème du RG, est qu’il est annoncé comme une vérité « centenaire », pas que des gens aient tenté de concevoir des modèles pour tester leurs hypothèses sur le RG.
#2. Effectivement. Par contre on a bel et bien des mesures (et non des modélisations) qui montrent que le pergélisol était rikiki lors de l’Holocène Optimum, il y a 8.000 ans, à une époque pourtant où le nombre de 4×4 était strictement égal à zéro.
C’est au moins une constatation incontestatble mais hélas, une vérité qui dérange pour Al Gore et la confrérie alarmiste.
A l’époque je ne suis pas certains que près de 7 milliards d’habitants auraient vécu dans le confort.. Et les cycles glaciations/réchauffements prenaient pas mal d’années..
Euh, tu dois avoir raté un épisode du film.
Il y avait la glaciation il a encore 20 ka, puis un climat plus chaud que maintenant il y a 8 ka puis notre période actuelle qui se réchauffe mais qui est toujours plus froide, avec plus de permafrost qu’il y a 8 ka.
A propos de froid, allez jeter un coup d’œil sur le site relevé par Abitbol qui présente les relevés de nombreuse stations météos, particulièrement celle-ci (pôle sud)
http://www.john-daly.com/stations/amundsen.gif.
Un grand froid sur le réchauffement lié au CO2 !
Gaffe j’ai mis un point aprés le lien !
http://www.john-daly.com/stations/amundsen.gif
@MiniTAX
La question est : y a t-il eu un épisode montrant un réchauffement de plusieurs degrés en quelques siècles maximum ?
@ DM
Bien sur !
L’optimum médiéval, mais avant l’optimum romain et plus tôt encore, l’âge du bronze (grimpée trés trés abrupt).
Oh ! tu as remarqué que des périodes ou l’homme, les plantes et animaux se sont particulièrement bien développés.
A croire que les périodes chaudes sont bénéfiques !
Salaud de bon dieu qui ne respecte ni Al Gore, ni les alarmistes.
Personne ne peut répondre à ce genre de question. Un normand dirait : p’têt ben que oui, p’têt ben que non…
Il faudrait commencer à reconnaître que l’homme n’a pas une compréhension exaustive des différents phénomènes naturels. Il émet des hypothèses, il construit des théories et pour l’instant, il n’a posé le pied que sur son satellite distant en moyenne de 385 000 kilomètres quand on parle d’un Univers de plusieurs milliards d’années lumière.
Encore un phénomène sur ces liens qui pourrait expliquer le changement actuel, si changement il y a…
http://www.futura-sciences.com…..erre_8525/
http://fr.wikipedia.org/wiki/I…..e_la_Terre
http://www.cea.fr/le_cea/actua…..agnetiques
http://fr.wikipedia.org/wiki/Inversion_du_champ_magnétique_de_la_Terre
Vers une nouvelle inversion du champ magnétique terrestre ?
« Aujourd’hui, le champ géomagnétique total diminue, ce qui pourrait causer un désastre vers les années 4000 si cette tendance se poursuit. D’autres sources prévoient cette inversion vers les années 3000. Cette déterioration a commencé il y a approximativement 150 ans et s’est accélérée ces dernières années. Depuis, la force du champ magnétique terrestre a décru de 10 à 15 %. Cependant, personne n’est sûr que la diminution de ce champ continuera dans le futur. Comme jamais personne n’a observé ces inversions et comme le mécanisme de génération du champ magnétique n’est toujours pas bien compris, il est difficile de dire si les variations observées sont les signes d’une nouvelle inversion. »
Et oui… CO2 et champ magnétique terrestre : même combat !
Pour compléter la réponse d’Abitbol, l’augmentation de taille des humains est aussi trés bien corrélée au variations de CO2 (et donc du climat).
Une nouvelle piste à suivre ?
Pour finir sur ce thème, toutes les pistes sont bonnes à suivre mais seule une théorie fondée sur des faits et explicant sans hiatus, l’ensemble des phénomènes observés clôturera le débat.
Souvenez-vous, à la fin du XIXème siecle, l’ensemble de la communauté scientifique (ça ne vous rappel rien ?) pensez la science fini. Ne restait que des problèmes d’intendance, calculs, observations de confirmations…
Mais voilà, une observation résitait, oh, rien du tout, juste que le résultat de l’équation du rayonnement d’un corps ne correpondait pas à l’observation quand on passais progressivement à l’ultra-violet (la « catasrophe ultra-violette »).
Et une autre intriguait, quelque soit la direction d’observation, la vitesse de la lumière était constante.
Ces 2 microscopiques faits dans l’océans des confirmations et preuves de l’achèvement de la science, allaient changer à tout jamais la physique, l’astronomie mais aussi la vision du monde qui en moins d’un quart de siècle va passer du détermisme absolu à l’indetrmination du monde quantique.
C’était Lord Kelvin seul qui disait « There is nothing new to be discovered in physics now. All that remains is more and more precise measurement. »
Ce n’est pas donc « la communauté scientifique » et lord Kelvin ne parlait que de la physique (et non « la science »). N’utilise pas d’argument d’autorité du « consensus », ça ne marche pas ici 😉
Désolé, la tendance de la communauté scientifique de l’époque, et, bien entendu tout les microcosmes attenants pensaient que la science était fini.
Il suffit de voir avec quelle réticence la mécanique quantique a été accueilli, et a continué de l’être, une grande partie du XXème siècle. Qaund à la relativité restreinte, sans parler même de la relativité générale, qui la comprend aujourd’hui ?
Deuxio, il ne s’agit nullement d’un argument d’ »autorité » mais d’un rapprochement issu d’un jeu de mots – un peu d’huumour miniTax 😉 !
Dans le même genre, on a observé en Belgique dans une région une recrudescence du nombre de naissance, et il se trouve que les cigognes connaissent également un accroissement. Incroyable non ?
Le GIEC ne se base pas sur 1 ou 2 observations/corrélations pour faire sa conclusion.
@ DM
Excellent, les cigognes et écologiques en plus !
Et on en est à bien plus que 3 corrélations, le champ magnétique, les cigognes, la taille des humains… A-t-on encore besoin du CO2 ?
#17 Ca n’a rien à voir avec les cigognes ! Les bébélges surnuméraires, c’est dû à la surconsommation en choux chinois.
http://www.futura-sciences.com…..lle_14120/