« On pourrait fixer le début de l’Anthropocène à la dernière partie du XVIIIe siècle : à ce moment-là, les analyses de l’air emprisonné dans les glaces polaires montrent le début de l’augmentation des concentrations mondiales de dioxyde de carbone et de méthane. Cette date se trouve également coïncider avec l’invention par James Watt de la machine à vapeur en 1784 »1.
Paul Crutzen aurait aussi bien pu indiquer une autre coïncidence, à vrai dire plus troublante : la publication, en 1780, des Époques de la nature de Buffon. Au moment précis où l’humanité devient une force géologique, Buffon explique que « la face entière de la Terre porte aujourd’hui l’empreinte de la puissance de l’homme ». Cette influence s’exerce même sur le climat : en gérant convenablement son environnement, l’humanité pourra « modifier les influences du climat qu’elle habite et en fixer pour ainsi dire la température au point qui lui convient »2.
Les temps barbares: l'adaptation et les transhumains
Eusèbe de Salverte, médecin, révolutionnaire puis député, proche des Idéologues et ami de Cabanis, est celui qui va le plus loin dans l’élaboration de ce projet d’une ingénierie climatique et humaine. Dans Des rapports de la médecine avec la politique (1806), il détaille les avantages médicaux de l’Empire napoléonien. Parce que le territoire soumis s’étend sur de nombreux climats et de nombreux peuples, il est possible par des « transmigrations » d’adapter les populations aux climats qui leur seraient les plus favorables. L’autorité nouvelle du gouvernement permet aussi d’envisager des hybridations entre les peuples afin de produire un optimum racial. Enfin, par des grands travaux, le gouvernement pourrait améliorer la « constitution physique du climat » et derechef celle des populations.
Des petites causes invisibles aux conséquences dramatiques
Des modifications environnementales en apparence bénignes peuvent avoir des conséquences terribles. Par exemple, selon l’abbé Richard, une épidémie aux Molluques hollandaises aurait eu pour cause la destruction des girofliers dont les particules aromatiques corrigeaient l’air corrompu par les fumées d’un volcan9. Si l’action de l’homme peut améliorer climats et populations, elle peut aussi conduire à la catastrophe.
L'homme et le libéralisme à l'assaut de la Nature
Fourier révait-il du GIEC ?
Le Principe de précaution contre les sept plaies d'Egypte
Politisation, chute de la théorie des climats et … graine de crosse de hockey
La question du changement climatique devient donc un objet politique majeur après la Révolution, mais la science académique a bien du mal à le prendre en charge car il demeure étranger au programme expérimental et mathématique qui domine alors les sciences physiques. Les savants qui, comme Arago, sont enrôlés dans l’expertise climatique rechignent à donner des réponses claires et soulignent les difficultés de l’entreprise : comment définir le changement climatique ? Comment distinguer l’épiphénomène de la tendance de long terme ? Quels critères prendre en compte (précipitations, phénomènes extrêmes, température) ? Alors que les savants valorisent la mesure et la précision comme critères d’objectivité, les gouvernements successifs leur imposent l’étude d’un objet difficilement saisissable en ces termes.
Premièrement, la révolution pasteurienne invalide les étiologies climatiques : les médecins, pour expliquer les maladies, disposent dorénavant de coupables précis et microscopiques et n’ont plus besoin d’invoquer la généralité des choses environnantes.
discutée mais un consensus existe pour en attribuer la survenue à des causes extérieures à l’agir humain : variations des taches solaires et surtout évolutions séculaires de la trajectoire et de la position de la Terre sur son axe, selon la théorie – aujourd’hui en cours – du savant serbe Milutin Milanković. Les climats sont vus comme des cadres fixes, constants à l’échelle du millénaire, et imposant leurs contraintes particulières au développement des sociétés.
», La Vie des idées, 20 avril 2010.
Merci à Geoff Chambers et Ruth Dixon pour avoir découvert ce texte.
1 Paul Crutzen, « Geology of Mankind », Nature, 3 janvier 2002, p. 23. Mike Davis, « Bienvenue à l’Anthropocène », disponible en ligne sur le site web de la revue Contretemps (http://www.contretemps.eu/).
2 Georges Louis-Leclerc de Buffon, Les Époques de la nature, Paris, Imprimerie royale, 1780, vol. 2, p. 197.
3 Circulaire du ministère de l’Intérieur du 25 avril 1821.
9 Abbé Jérôme Richard, op. cit., vol. 2, 1771, p. 412.
11 Antoine-Alexis Cadet de Vaux, « Observation sur la sécheresse actuelle, ses causes et les moyens de prévenir la progression de ce fléau », Moniteur universel, 26 août 1800.
12 Il s’agit de notes préparatoires pour le Traité de l’association domestique agricole : théorie de l’unité universelle, publiées dans La Phalange en 1847. Pour une vision de la terre comme un être vivant que l’humanité risque de tuer, voir Eugène Huzar, La Fin du monde par la science, 1855.
13 François Arago, « De l’influence du déboisement sur le climat », OEuvres complètes, Paris, Gide, 1859, vol. 12, p. 432.
25 Fabien Locher, Le Savant et la Tempête. Étudier l’atmosphère et prévoir le temps au XIXe siècle, Rennes, Presses universitaires de Rennes, 2008 ; « Configurations disciplinaires et sciences de l’Observatoire : le cas des approches scientifiques de l’atmosphère », Enquête. Anthropologie, Histoire, Sociologie, 5, 2006, p. 193-212.
24 réponses à “L’homme est coupable, trois siècles de changement climatique”
Merci pour cet article,
Attention coquille dans titre du dernier paragraphe : chuTTe …
Suite à lecture de l’introduction d’un article de M Leroux, j’en étais resté à la climatologie comme branche mineure de la géographie (« les climats, océanique, méditerranéen, continental etc »), alors que cette « affectation » est finalement assez récente.
Bien aimé le « dérèglement climatique » indiqué en 1820, comme quoi on n’invente rien !
Le défrichement/déboisement comme cause de changements environnementaux (et pour cause) mais jusqu’à y compris « climatique » (déjà !) est assez bien vu.
pastilleverte (#1),
La première chose qui m’avait fait réfléchir à la question est l’écart de nombreux ordres de grandeurs entre l’énergie déployée par l’activité humaine et celle mise en jeu dans la machine climatique. Les centaines d’essais nucléaires dans l’atmosphère n’ont eu que des effets superficiels, ils sont utiles par contre pour évaluer le temps de résidence du CO2 dans l’atmosphère.
On a souvent cité le paradoxe de (ou attribué à) Joseph Lorentz sur le battement d’aile de papillon; même une application de la théorie du chaos (apparent) donne une réponse négative: pas de nouveaux attracteurs http://www.skyfall.fr/wp-conte…..cteurs.pdf.
De quelque côté qu’on se tourne, on bute sur des impossibilités (gaz à effet de serre, aérosols, chaleur cachée… quelque part; on sait bien que l’eau chaude va au fond 😆 ), mais on entrevoit des explications: théorie adiabatique, cycles solaires.
Autre coquille: assault
Merci, j’ai corrigé les fautes.
Il faut faire attention au vocabulaire employé dans le texte. Le mot climat au 18ème siècle n’a pas le même sens qu’aujourd’hui. Le français est une langue qui a énormément évolué et sans avoir lu les textes originaux cités dans l’article je présume qu’il s’agit plus de traductions que de citations exactes.
pastilleverte (#1),
C’est vrai mais on manque encore d’imagination. On pourrait, dans la logorrhée de certains, parler de :
Don gratuit aux réchauffistes.
h/t CRISCO dico synonymes.
Nicias (#3),
J’en vois encore une bleue « … aux conséquences dramatiques »
Nicias (#3),
Pour la signification du mot « climat », je me doutais bien que la langue avait évolué et que le « contenu en était différent aux XVIII et XIX ° siècle.Bob (#4),
Merci pour les « synonymes » (mais est-ce bien le terme scientifiquement approuvé par les modélisateurs ?) .
scaletrans (#2),
Vous avez parlé de l’énergie mise en jeu dans la machine climatique.
Cela m’a immédiatement fait penser à cette réponse à Dana Nuccitelli – un excité du gang SkS de John « Crochet » Cook – que je venais de lire sur le blog de WUWT :
Ce que j’ai traduit (avec l’assistance du Bing Traducteur) :
Cdt TSM JCl Michel e.r. (#7),
Merci, je vais diffuser ce texte si simple et si clair auprès de quelques enclumes de ma connaissance.
scaletrans (#8),
Hum ! Une ampoule led, ça chauffe pas. Lumière froide comme on dit mais en remplaçant LED par ampoule de sapin de 0,6W, ça convient.
Bob (#9),
Vous avez parfaitement raison.
Je me suis contenté de corriger le plus fidèlement possible la
trahisontraduction du message en anglais par Bing.Je sais bien sûr qu’une led ne chauffe pas quand elle est alimentée directement sous la bonne tension en continu. Mais cela n’est pas le cas des ampoules LED 220 V que l’on nous vend. Il y a de l’électronique dans le culot et c’est elle qui chauffe pas mal.
Après une dizaine de minutes de fonctionnement, sur une ampoule Sylvania RefLED ES50 de 5W 220-240V je mesure une température de 50 °C avec un thermomètre IR sans contact.
Il y a bien pire. J’ai une lampe de bureau avec un mini tube fluo de 11 W Celui-ci n’est pas très chaud mais il ne faut pas mettre sa main sur le ballast de l’alimentation sous peine de se brûler.
scaletrans (#8),
et moi à quelques marteaux de ma connaissance…
Attention !
Un ampoule de 30 watts placée à 2 mètres fournie un flux de 0,6 W/m2.
Très bel article, qui démontre, si encore besoin est, que l’hystérie climatique actuelle est bel et bien une superstition ancienne, avec les mêmes arguments d’autorité foireux (« la science a dit que », « on a trouvé la cause »), le même chantage moral (il faut agir, c’est imminent, on va tous mourir…), les mêmes mièvreries écologistes et surtout les mêmes opportunistes (politiciens, étatistes, comités ad-hoc ) pour profiter de la crédulité et de l’obscurantisme des gens.
Il est amusant de noter le gros mensonge par omission des propagandistes de la FARCE, qui se réfèrent à Fourier seulement comme scientifique, en « oubliant » de signaler que c’est avant tout un communiste enragé doublé d’un malthusien fanatique qui s’est servi du « dérèglement climatique » surtout comme prétexte pour justifier un reset de la civilisation occidentale.
Ce sera marqué dans mes références.
Bob (#9), une ampoule Led, ça a un point de fonctionnement à 2 volts et 20 mA.
Ca fait 40 mW de puissance dissipée.
C’est à dire quasiment rien !
Maintenant, c’est pas parce que ça chauffe peu que ça chauffe pas du tout, 40 mW c’est 40 mW.
miniTAX (#13),
Je crains que vous ne confondiez Charles Fourier et Joseph Fourier.
miniTAX (#13), oui, j’étais justement en train de lire ce site…
Même si je connaissais l’œuvre de J. Fourier, (et pratiqué des « transformées » à tour de bras à une époque) j’ignorais totalement son engagement politique en faveur du parti communiste et des idées de Malthus.
J’ai lu attentivement tout ce site et je n’y ai vu qu’un savant remarquable et un grand serviteur de l’état.
Il doit y avoir erreur…
Murps (#14), une LED de 40mW, c’est pour la déco des sapins ou pour les voyants d’appareils électroniques mais certainement pas pour l’éclairage de plafond (sauf peut-être dans une yourte d’écolo). Les leds d’éclairage, c’est plus de 0,5W et de plus en plus souvent 1W et + (alimentées avec des sources de courant de 300mA) et montées sur des semelles en alu pour dissiper la chaleur. Et ça chauffe un peu si c’est regroupé, par exemple dans un format ampoule à visser. Le rendement des leds, c’est maximum 2/3, les 1/3 de perte se retrouvent fatalement sous forme de chaleur.
Jean-Marc (#15), oui, désolé pour la confusion, je ne connaissais que Fourier le scientifique.
Jean-Marc (#15),
Très bonne remarque, je n’avais pas fait attention au prénom non plus. C’est le Fourier des phalanstères, un précurseur du socialisme.
Incroyable…Ils sont capables de prévoir le climat qu’il y aura en 2100 dans votre ville.
06/12/2013
« Les projections climatiques régionalisées réalisées dans le cadre du projet Euro-Cordex viennent d’être rendues publiques. Elles permettent d’envisager le futur climatique de l’Europe à l’horizon 2100 avec une résolution spatiale inégalée de 12 km. Elles prévoient une hausse des températures en Europe de 1 à 5 °C d’ici la fin du XXIème siècle et révèlent des disparités saisonnières et régionales marquées. Les évènements extrêmes, pluies intenses et sécheresses par exemple, devraient être plus nombreux. »
http://www.meteofrance.fr/web/…..eId=976576
La voiture électrique, pas si propre
Une étude de l’Ademe remet en cause le dogme de la propreté des véhicules électriques.
http://www.lefigaro.fr/automob…..propre.php
savoy (#21), Tout à fait. Et encore, comme le signale le Figolo, la fin de vie de la batterie n’est pas pris en compte par l’étude. (ce qui est un peu du fdg…)
chercheur (#20),
Entre 1° et 5°, mon cœur balance…
savoy (#21), Clem (#22),
Ce qui est pénible dans ce type d’enquête, on a l’impression que l’on apporte une sorte de caution indirecte à l’idée qu’il est bien de limiter le CO2. Montrer que la voiture électrique ou autre connerie de ce genre n’est pas la solution aux problèmes que l’on aura lors de la disparition du pétrole, on le sait depuis très longtemps. Mais en ne redisant pas à chaque fois que la chasse au CO2 on en a rien à f…, du moins tant que son incidence sur T° n’est pas démontrée, on se donne des verges pour se faire battre. C’est vrai que le figolo est nul sur ce point et pense que le GIEC parle au nom des dieux… En attendant, on se marre de voir l’ADEME faire cette analyse, quand on sait sa soumission au « dogme »…
Bon NOËL à tous !
Duramen