par Benoît Rittaud.
Oui, c’est peut-être à ça qu’on peut les reconnaître.
Un simple regard sur le rapport d’août 2014 sur le climat de la France au XXIe siècle qui nous a été pondu pour le compte du ministère de l’écologie et du dév’dur’ donne déjà de quoi rigoler. Vraiment juste un regard. Ça se passe à la page 17, avec le gros-tableau-qui-fait-peur que voici, dont la substantifique et horrifique moelle a été reprise un peu partout dans les médias.
C25 et C75 correspondent aux 25e et 75e centiles d’un ensemble de modèles régionaux, WRF et Aladin-Climat sont, eux, les deux modèles plus explicitement considérés dans le rapport. RCP signifie Representative Concentration Pathways. Il s’agit des scénarios envisagés pour les émissions futures. Ce qu’il faut en retenir, c’est que plus la valeur après les lettres RCP est grande, plus les émissions de CO2 sont supposées importantes au cours du XXIe siècle, et donc, selon le GIEC, plus la température devrait monter. Je ne vois aucun moyen pour un modèle GIEC-compatible de faire autrement.
Or dans le tableau, cette propriété incontournable est violée en pas moins de six endroits différents.
Quelle que soit la colonne que l’on regarde, on y trouve au moins un cas dans lequel plus d’émissions implique moins de réchauffement. Le modèle WRF a droit à la palme d’or des résultats les plus aberrants : pour la période 2021-2050, qui pourrait pourtant sans problème s’appeler « demain », dans deux cas sur quatre WRF réchauffe moins la France avec un scénario à (nettement) plus de CO2. Et pas qu’un peu : de +1°C à +0,6°C pour les étés, de +1,3°C à +0,8°C pour les hivers. Un anglophone pourrait peut-être rebaptiser le modèle en remplaçant le R par un T…
Lorsque j’étais jeune étudiant sur les bancs de l’Université, un enseignant de physique avait eu la bonne idée de m’enseigner la notion de critère de pertinence. L’idée est que lorsqu’on a fini un calcul, on n’a pas pour autant fini le travail : il reste à porter un regard critique sur le résultat et la manière dont il a été obtenu, pour se donner une chance de repérer une éventuelle erreur. Que pas un des six climatologues qui ont planché sur le rapport ne se soit posé la question de l’application d’un critère de pertinence aussi simple et évident que le précédent en dit hélas long sur certaines pratiques en climatologie : adoration du Grand Ordinateur, dévotion pour les « chiffres », et manque total d’esprit critique.
97 réponses à “Les modèles climatiques osent tout”
Nicias (#49),
Diable, la littérature sur le « warming hole » est abondante.
dontcare (#45), Bah à ce compte puisqu’on pinaille à mort, vos RCP ne « divergent » pas non, ni en 2100, ni en 2250, ni jamais plus puisqu’ils finissent en droites parallèles, cf figure 2 du rapport. Donc je confirme, ce que vous disiez est une crétinerie totale.
dontcare (#45), ce qui est ridicule, c’est de persister à affirmer que parce que les RCP ne sont « pas très différents » (quoi que ça puisse vouloir dire), alors les températures simulées par les modèles ne seraient pas très différentes alors qu’on vous a montrée la preuve incontestable chez climateprediction.net que les modèles peuvent pondre des températures très différentes avec un scénario identique (il suffit par ex. de changer légèrement les paramétrisations).
Mais comme en bon bigot réchauffiste, vous n’admettrez vos idioties, vous essayez de noyer le poisson avec de vagues diversions pseudo-scientifiques non quantifiées (donc impossibles à réfuter) comme « pas très différents », « largement plus différents », c’est d’un classique à pleurer.
Nicias (#51),
http://journals.ametsoc.org/do…..11-00655.1
miniTAX (#52),
Effectivement, vous pinaillez sur « divergent ». J’admet, ce n’est pas le bon terme, même si tout le monde avait compris.
Votre « linéaire » par contre, même en étant très ouvert d’esprit, personne ne peut le voir.
Sauf que je n’ai jamais parlé de température entre différent modèles, ou d’un même modèle avec différentes paramétrisations. Vous accusez dans le vide là…
On parlait d’un même modèle, simulant différents RCP. Ce qui est en rouge dans le tableau de ce post quoi. WRF forcé avec RCP2.6 et 4.5 par exemple.
Si le forcage radiatif de RCP2.6 et 4.5 sont très similaires avant 2050, alors WRF ne vas pas produire de différences importantes entre ces 2 runs sur 2021-2050. C’est tout ce que je disais. Que les chiffres « 2.6 » et « 4.5 » ne veulent pas dire grand chose sur cette période.
Et donc quand Benoit écrit « c’est que plus la valeur après les lettres RCP […] plus la température devrait monter »
Ce n’est pas pertinent pour toute les périodes. CQFD.
Nicias (#53),
Merci bien !
« A warming hole appears in only several ensemble members »
Donc apparemment juste assez rarement…mais cela montre quand même que les modèles sont « capable » de produire ce « warming hole ».
dontcare (#54), en même temps on ne sait pas ce qui a été mis dans les modèles.
Si la variable température est programmée pour monter en log[CO2], alors si [CO2] croît, T doit croître.
De toutes façons ces simulations sont invérifiables et ne valent absolument rien, c’est déjà leur faire trop d’honneur que de les publier, presque un scandale, tant elles sont une insulte à la science et au bon sens.
dontcare (#54), surtout, personne ne peut voir la « divergence », gros malin ! Le forçage, une fonction logarithme du CO2, ne peut croître que de manière linéaire, donc l’idée de « divergence de RCP » est une crétinerie dès le départ, ce qui veut dire que l’idée que les « RCP ne sont pas très différents avant 2050 » également.
Bah c’est FAUX, cf la preuve dans le lien. Ce n’est pas parce que vous répétez 100x une fausseté que finirait par être vrai !
dontcare (#54), en principe, plus il y a de CO2 plus l’effet doit croître, quel que soit cet effet (plus chaud/plus froid/plus de précipitations/moins de précipitations…). On ne peut pas sortir de ça à moins d’invoquer un seuil particulier du genre : à partir de tel niveau d’émission, on entrerait dans un scénario à la Emmerich où l’évolution s’inverserait (au moins au niveau local). Rien n’est dit dans le rapport sur ce point, cela me semble une lacune pour le moins… problématique.
Par ailleurs, on ne peut pas s’en sortir en invoquant une différence faible entre les scénarios avant 2050, parce qu’il devient alors impossible de justifier l’énorme écart des prévisions de WRF selon les scénarios (été comme hiver, toujours sur la période 2021-2050).
On pourrait avancer que, au moins pour C25 et C75, les aberrations « plus de CO2 moins de réchauffement » sont effectivement moins marquées, le problème est que C25 et C75 sont des centiles, c’est-à-dire de moyennes faites sur un nombre de runs supposés suffisamment important pour lisser les aléas propres à un run unique.
Je n’ai pas encore regardé ce qu’il y a dans Drias, mais il me semble que Nicias a suggéré l’explication la plus plausible au début de ce fil : le rapport se fonde sur trop peu de runs. Et vu les aberrations, les auteurs auraient dû s’en rendre compte.
Ben (#58),
Je ne suis pas d’accord. En théorie il peut y avoir un effet de saturation, non ?
Laurent Berthod (#59),
A moins que vous ne parliez du modèle.
Laurent Berthod (#59), l’effet peut certes croître de moins en moins, l’important est qu’il ne peut pas s’inverser.
miniTAX (#57),
Oh que vous êtes borné. Entre 2050 et 2100 un des RCP monte, un stagne et un autre descend. Compris ? Et je parle de forcage directement ici, donc votre fonction log du co2 on s’en fiche.
Non, votre lien n’a rien à voir avec ce que je dis. Comme je vous l’ai expliqué, je parle pour un même modèle, même paramétrisations.
Les modèles globaux ont deux problèmes.
– Un, la complexité du système lui-même. La terre représente un système dynamique extrêmement complexe présentant, plus que probablement, une certaine sensibilité aux conditions initiales. Il est à parier que même un modèle « parfait » pourrait présenter des trajectoires sensiblement différentes pour de très petites variations des conditions initiales ou des paramètres.
– Deux, les modèles sont construits sur base d’un nombre assez impressionnant d’hypothèses, pas toujours bien justifiées. Cela ajoute de l’erreur à l’erreur, si vous voyez ce que je veux dire.
Mes conclusions personnelles sont donc les suivantes :
– Leurs résultats ne peuvent se concevoir qu’en termes de moyennes et d’écarts à celle-ci, étant donné le caractère quasiment probabiliste de leur dynamique.
– La seule façon de svoir si un modèle est meilleur qu’un autre, c’est de comparer leurs capacités respectives à reproduire le passé, ainsi que leur capacité de prédiction. Ce qui sous-entend qu’on devrait laisser aux modèles au moins 5-10 ans pour faire leurs preuves.
C’est ce qu’on a fait et ils sont tous déficients !
Cho_cacao (#63),
C’est ce qu’on a fait et ils sont tous déficients !
L’info que j’avais trouvé était plutôt qu’ils donnent tous des tendances globales plus ou moins correctes, mais sont un peu nuls en ce qui concerne les tendances régionales :
Cho_cacao (#66),
peut-être vous devriez lire changement climatique de larminat, c’est un livre plus ou moins de spécialiste , mais on comprend bien le fond.
Ben (#61), certes.
Mais on peut citer des phénomènes très simples, par exemple en chimie des solutions, ou l’ajout de soude provoque un précipité et ou l’excès de soude provoque une redissolution du précipité.
Vous avez également des systèmes chimiques oscillants avec du sulfate de cérium…
Plus généralement on peut trouver des systèmes dynamiques avec des comportements « catastrophiques » au sens de René Thom.
Si on a aucune idée du mécanisme, on peut très bien imaginer que l’ajout de beaucoup de CO2 provoquera une hausse brutale des températures, ou bien une limite asymptotique de la hausse… Ou encore une chute brutale, voire même l’équivalent d’une hystérésis (une « catastrophe pli ») c’est à dire que la chute du CO2 ne changerait plus la température tant qu’on y est !
Le problème de ces « modèles », c’est que je les soupçonne de fonctionner selon la règle de trois :
« plus qu’il y a de cO2 plus que la température elle monte ma bonne dame ! »
en l’absence de compréhension du phénomène, on ne peut pas faire autre chose de toute manière.
Bien sûr, rien ne dit que la nature est faite de réponses linéaires et/ou monotones. En plus des oscillations, on peut aussi citer les multistabilités (coexistence potentielle de plusieurs états pour des mêmes paramètres), ou le chaos déterministe.
Murps (#68),
J’ai vécu ce phénomène avec une soupe chinoise qui avait une consistance assez gluante, pas désagréable, j’y ai ajouté un peu de sel et elle est devenue liquide à mon grand désarroi.
Jojobargeot (#70),
On n’ajoute pas de sel dans une soupe chinoise. ça doit détruire le mécanisme de floculation comme le font souvent les ions.
Cho_cacao (#69), absolument.
Bob (#71), sur ce point culinaire je vous suis également.
Pour la floculation, je n’entrave que pouic.
Je rentre de quelques semaines de voyages dans les pays tropicaux où j’ai pu constater une nouvelle fois l’impossibilité d’avoir des prévisions météo fiables, même à très court terme.
Je m’étonne qu’il y ait un terme qui ne soit jamais, ou presque, employé ici, c’est celui de hasard.
Il me semble que dans certains domaines, dans certaines situations, dans certains endroits, c’est plus le hasard qui détermine les phénomènes à venir.
Il faut accepter le hasard comme élément déterminant de phénomènes naturels. Ne pas le faire, c’est ne pas suivre une démarche scientifique cohérente.
Murps (#72),
Pour une fois wiki ne dit pas d’âneries :
C’est probablement ce qui donne un aspect onctueux aux soupes chinoises (ou autres). Je n’en suis pas certain mais c’est probable.
Plus loin dans le même wiki :
Comme ceux du sel de cuisine.
chercheur (#73),
je pencherais plutôt pour celui de chaos. Le hasard est au niveau des évènements extérieurs: éruptions volcaniques, météorites…
Le comportement du système climatique est surtout déterminé par des phénomènes modulés à des fréquences différentes et asynchrones et par des constantes de temps.
Bob (#74), merci.
C’est des grumeaux qui s’agglomèrent, donc.
Et l’ajout de sel rend donc les « grumeaux » plus solubles… C’est marrant car en général c’est le contraire. Un relargage c’est un moyen de séparer une espèce chimique d’une autre en jouant sur leur différence de solubilité. Par exemple en jetant le produit d’une estérification (alcool, acide, ester, eau) dans une solution saturée de sel : l’ester remonte en surface.
jdrien (#75), oui. Le hasard et le chaos, c’est pas tout à fait la même chose. Si le hasard « marchait » sur les systèmes chaotiques on pourrait utiliser les probas, et ils ne le seraient plus, chaotiques.
Murps (#76),
C’est amusant parfois la cuisine !
On ne se doute pas que pour faire un bon plat, on utilise, des molécules qui agissent sur l’affinité des diverses phases entre elles pour les disperser, les assembler …
Et que l’on fait appel à des molécules ou des ions pour jouer sur la tension superficielle des phases , pour les épaissir, les disperser, ou les agglomérer. Ce ne sont pas généralement des fortes quantités, mais le résultat sur la propriété organoleptique finale est important.
Ça reste un art tout de même, où l’expérience est prépondérante.
Bernnard (#77),
Abordée avec le talent d’Hervé This, c’est même un… régal ! 😛
Vous le connaissez déjà probablement.
HERVÉ THIS : A PROPOS DE L’AUTEUR
Hervé This est surtout physico-chimiste dans le Groupe INRA de gastronomie moléculaire.
Lire la suite…
http://www.scilogs.fr/vivelaco…..thor/this/
Murps (#76),
A vrai dire, pour être précis, le sel ne rend pas les flocs moins solubles. Les ions du sel coupent ou affaiblissent les liaisons qui maintiennent la cohésion du floc (ou du grumeau, comme vous dites). L’édifice floc s’écroule et les molécules du floc se retrouvent dispersées.
JG2433 (#78),
Oui je le connais! et j’aime aussi cuisiner. 😛
chercheur (#73),
« Le hasard ? C’est Dieu qui se promène incognito. »
Dixit Einstein; Joli, non ?
Bob (#81),
Oui, c’est une très belle formule, qui montre la difficulté qu’il avait à appréhender la réalité du hasard.
chercheur (#73),
Il n’y a pas que dans ces pays à la météo mouvementée
Cela fait trois semaines que je suis en Alsace dans le brouillard et la grisaille ; tous les jours on m’annonce 7 à 9°C et le thermomètre n’a pas dépassé les 6°C et depuis huit jours les 4°C
Mais comme les gens ne vivent plus dehors , ils ne se rendent pas compte et prennent ces chiffres pour la réalité
chercheur (#82),
Ou, plutôt, l'utilisation des probabilité par la mécanique quantique. "Dieu ne joue pas au dès", disait-il.
the fritz (#83),
Je suis, comme vous, étonné des différences entre les annonces de températures et la réalité. Je suis pourtant à l’opposé de l’Alsace…sur l’ile de Ré.
Bob (#84),
J’avais lu une analyse à priori intéressante sur le hasard.
http://www.danielmartin.eu/Philo/Resume.pdf
Quand des scientifiques, ce qui est le cas de l’auteur, se mettent à philosopher, on arrive à du grand n’importe quoi. JF Revel avait, en son temps, parfaitement analysé cette dérive.
chercheur (#85),
Comme disait Staline, l’important ce n’est pas celui qui vote mais celui qui dépouille le scrutin.
Ici, l’important ce n’est pas la température exacte, mais celui qui annonce les chiffres dans les médias.
Article traduit ici
https://geoffchambers.wordpress.com/2014/12/02/benoit-rittaud-climate-models-capable-of-anything/
J’ai envoyé un propos pour an article à http://skyfall.fr/?page_id=30 (je crois) il y a une semaine. L’avez-vous reçu?
geoff chambers (#88),
Geoff,
Un projet d’article en français, ‘XXX chez les Bretons » nous est parvenu. On s’en occupe.
Bob (#74),
Pour les soupes chinoise ce serait sans doute plutôt un changement de phase gel/sol :
« Certains ingrédients, de part la configuration adoptée par les macromolécules dans l’espace, peuvent former un gel lorsqu’ils sont mis en solution. En effet la gélification dépend en premier lieu de la capacité des macromolécules à s’associer entre elles ou avec d’autres macromolécules du milieu en liant une quantité importante d’eau.
Pour former un gel, il faut que le polymère soit bien solubilisé en solution (plus celui-ci sera ramifié, pus il sera soluble) et il faut un compromis entre l’association des chaînes entre elles et la solvatation du composé. »
ICI
Laurent Berthod (#90),
Oui, c’est bien possible aussi. J’ignore si la soupe chinoise est un gel ou un floc.
On pourrait ouvrir un fil de chimie culinaire
Bob (#91),
Remarquez que moi aussi.
Simple complément d’information, un gel ce n’est pas seulement la gelée bien ferme de vôtre rôti de porc. Dans votre Danette au chocolat il y a aussi pas mal de gélifiant.
Laurent Berthod (#90), Je vous conseille le Tapioca, ça marche à tous les coups, et avec un peu de sucre, c’est succulent (terme utilisé ce soir par ma fille de 5 ans).
de Rouvex (#94),
Ne détournez pas la conversation, je vous prie ! Vous n’avez pas répondu à la question. Et d’abord, le tapioca, c’est un gel ou un floculat ? Hein, d’abord, hein !
Je vais mettre un petit grain de sel dans cette cuisine :
Tout le monde connaît l’agar-agar, c’est un polysaccharide qui suivant la proportion additionnée à l’eau, on obtient un liquide à l’ébullition et un gel à température ambiante. C’est une substance comestible l’agarose et on a bien un gel à 20°C.
C’est très utilisé et pas seulement en cuisine. Par exemple, on réalise des électrodes dites « solides » pour mesurer des potentiels électrochimiques qui contiennent un électrolyte piégé dans un gel aqueux contenant de l’agarose.
Laurent Berthod (#95), Qu’en sais-je, mon pauvre ami ?