par Benoît Rittaud.
Tout au long de l'année 2015, le climathon récompense chaque semaine la plus belle pièce de propagande climatique de la semaine écoulée.
Les vainqueurs des semaines passées : semaine 1, semaine 2, semaine 3, semaine 4.
Après une période de relative discrétion au plus haut niveau, les politiques se sont surpassés cette semaine, produisant l'essentiel de l'activité du climathon avec des réalisations du meilleur aloi. C'est très logiquement que la victoire leur revient cette fois-ci.
Manuel Valls, premier ministre français, a ainsi déclaré avant de monter dans l'avion le menant à Pékin pour une visite officielle de trois jours que la question des gaz à effet de serre était "le chantier principal" des relations franco-chinoises. Il est vrai qu'avec des exportations qui se sont élevées à 14 milliards d'euros en 2013 et des importations à 40 milliards d'euros (source), Français et Chinois manquent sans doute de sujets de conversation.
Relier le climat à tout, et surtout à n'importe quoi (comme la semaine dernière au terrorisme), est une voie royale pour gagner au climathon. Cécile Duflot l'a bien compris qui, cette semaine, est parvenue à placer la conférence Paris Climat 2015 au beau milieu d'une tribune publiée dans Libération sur la victoire de Syriza en Grèce :
Nous devons aider la Grèce, mais nous devons aussi l’inviter à ne pas tomber dans le piège traditionnel de la gauche. A une politique absurde d’austérité ne doit pas succéder une politique aveugle de relance. Tant les enjeux environnementaux que la lutte contre la pauvreté sont au cœur des urgences grecques. Que M. Tsipras ne s’enferme pas dans une course mystique à la croissance et fasse le choix d’une politique ciblée d’investissements. A quelques mois de la Conférence climat, il serait par exemple fort dommage que ce nouveau gouvernement privilégie le choix d’ouvrir des centrales à charbon plutôt que d’engager une véritable transition énergétique. A l’épreuve du pouvoir, tel sera le plus grand défi de Syriza, celui de bâtir un nouveau modèle de développement qui mise sur le partage et la coopération, plutôt que sur la concurrence.
Une fois encore, les pages "Planète" du journal Le Monde s'illustrent cette semaine avec ce publireportage cet article qui s'enthousiasme pour le "Global calculator" britannique mis en ligne il y a peu. Le titre de ce tract cet article de Philippe Bernard, "Un calculateur en ligne pour sauver le monde du réchauffement d'ici à 2050", est manifestement à prendre au premier degré, comme l'illustre son contenu dont voici quelques extraits :
"Imagine" un monde vivable pour tous en 2050. Ce n'est pas John Lennon qui invite à concevoir autrement la planète, mais le ministère britannique de l'énergie et du changement climatique (…)
Pédagogique, le "calculateur" fait apparaître des explications à chaque fois que les choix retenus contredisent l'objectif des "+2°C".(…)
Passionnante, la navigation permet d'imaginer l'infinité des combinaisons possibles entre politiques des transports, de l'industrie, du bâtiment ou de l'énergie à travers des schémas interactifs.(…)
La version internationale lancée mercredi ne prêtera sans doute guère à la controverse car elle ne prend pas en compte la variable nationale, se contentant de raisonner au niveau planétaire.
Cette dernière phrase à la naïveté particulièrement confondante a bien failli emporter la décision du jury. Croire échapper à la critique simplement parce qu'on se "contente" de raisonner à la planète entière révèle une incompréhension de ce qu'est la science tout à fait digne des meilleurs articles des pages "Planète" du Journalderéférence.
Les vainqueurs de la semaine 5
Conscients que la propagande climatique est aussi un bon moyen de faire parler de soi, quelques élus ont profité des "16è Assises de l'énergie des collectivités territoriales" pour lancer un vibrant "Appel de Bordeaux" qui montre qu'on peut fort bien choisir de se mettre à plusieurs pour se pousser du col avec le climat pour emblème. L'appel en question souligne ainsi une "volonté déjà en action". Avant tout le monde, les signataires sont "Témoins de l'évolution désormais perceptible du changement climatique" : le jury ne saurait trop leur conseiller de prévenir d'urgence Christophe Cassou, carbocentriste irréprochable (et vainqueur de la semaine 3 du climathon) qui a pourtant convenu dans son exposé à l'Académie des sciences que l'évolution du climat en Europe ne sortirait pas des limites de la variabilité naturelle avant le milieu du siècle.
En bons propagandistes qui se respectent, les signataires de l'Appel de Bordeaux, vainqueurs de la semaine 5, ne manquent pas de prétendre répondre à une demande de "nos concitoyens (…) de plus en plus conscients donc concernés". À ce sujet, le jury est dans l'obligation morale d'infliger un blâme au journal Le Point, lequel semble n'avoir pas songé que les réponses à son sondage intitulé "Sommes-nous en train de tomber dans une 'parano climatique' ?" pouvaient ne pas être dans la ligne du parti. Les trois quarts des 24 000 votants de ce sondage ayant répondu "oui", cela met l'Appel de Bordeaux en position indûment difficile pour promouvoir la cause des "générations nées à l'aube du XXIè siècle, qui sont et seront les premières à subir de manière sensible les conséquences du dérèglement climatique."
Enfin, les signataires de cet appel ont la bonne idée de mentionner leurs rôles respectifs dans divers comités Théodule instances vitales pour l'avenir de la planète. Bravo donc à
Alain Juppé (co-président de la CGLU),
Anne Hidalgo (présidente de l'AIMF),
Johanna Rolland (présidente d'Eurocities),
François Baroin (président de l'AMF),
Alain Rousset (président de l'ARF),
Hervé Gillé (représendant l'ADF),
Jo Spiegel (secrétaire national de l'AdCF),
Ronan Dantec (président de la commission environnement et dév'dur' de l'AFCCRE),
Jean-Patrick Masson (représentant l'AMGVF et l'ACUF),
Patrice Vergriete (membre d'ICLEI).
Ceux qui peuvent dire sans l'aide de Google ce que signifient tous ces acronymes sauveurs de générations futures ont toute l'estime du jury.
69 réponses à “Climathon, semaine 5 : le retour des politiques”
Nicias (#50),
Moi aussi, je vote pour Tubiana. Elle ne l’a pas volé. Et de loin.
Bob (#51),
une derniére déclaration de votre « chérie » avant la décision du jury.
reprise à genève
Bernnard (#48), C’est Molotov qui vous finance ?
de Rouvex (#53),
Les drones sont devenus abordables ! Fini le temps du modélisme cher ! Bon je plaisante.
Ben (#34), Cela fait même un moment que les aides accordées à nos (chers) agriculteurs intègrent l’objectif climatique : auparavant, on parlait de MAET (Mesures agro-environnementale territorialisées), aujourd’hui, ce sont les MAEC (Mesures agro-environnementales et climatiques). Vous conviendrez que les deux sigles sont aussi incompréhensibles l’un que l’autre, et je ne vous parle pas de la complexité des dossiers, des circulaires, et surtout de l’utilité effective de ces mesures pour l’environnement (pour le climat, nous savons tous que l’on peut parler d’inutilité)
Bernnard (#54),
Il y a plus de cinquante ans, je bavais devant les premières commandes proportionnelles des modélistes américains.
Scaletrans (#56),
Allez voir sur Z-Ligne Z
Bob (#57),
Vu
devinplombier (#52),
Maurice, revient ! (http://www.lafranceagricole.fr…..64770.html)
Bob (#51),
Ah enfin ! « Ma » Laurence…
enfin un climathonton politiquement correct sur le ligne chabadabada, ou du moins le début de…
Ne pas oublier que la dame est présidente du « Decarbonization project » de l’ONU, rien que ça ça mérite un prix avec palmes et tuba.
devinplombier (#52),
Confirmation de mon post précédent :
Ambassadrice du maintien coûte que coûte de « pas plus de 2°C avant la fin du Monde », (pour éviter la poêle à frire), ça renforce le sérieux de la candidature semaine 5.
volauvent (#59),
J’approuve ce point de vue !
je remets le lien pour qu’il soit cliquable.
Bernnard (#62), excellent article qui résume bien toute la situation actuelle. Malheureusement , tant que nos journalistes seront des militants écologistes ignares, la situation de pourra pas changer. Aujourd’hui sur Atlantico il y a un article de Jean Lesieur sur les journalistes et leur connivences avec le militantisme et les politiques, qui décrit bien cet autre aspect des choses.
@volauvent
je propose que le concours soit ouvert « amateurs » de temps en temps. Maurice me semble avoir le profil ad hoc.
Gilles des Landes (#55),
Je confirme que pour l’environnement c’est aussi nul que pour le climat.
Ecophob (#63),
Atlantico m’ayant sollicité pour un abonnement, j’ai pris la peine et le temps de leur répondre que tant qu’ils seraient coutumiers de leurs âneries réchauffantes, il n’en était non seulement pas question, mais que de plus je clame haut et fort mon point de vue à ceux qui me demandent mon avis.
http://www.mediapart.fr/journa…..mat-geneve
La dernière paragraph repète la bêtise habituelle sur “2°C, dit la science”. Est-ce que quelqu’un a la reférence pour la source de “2°C=danger”? C’était Schellnhuber de l’institut Potsdam, je crois.
geoff chambers (#67),
C’est bien Schnellnhuber . Il fallait donner du grain à moudre aux politiciens.
André (#66), je suis d’accord avec vous sur la position écolo-absurde d’Atlantico et je n’y suis pas abonné pour la même raison. Ca leur apprendra !
Cette position est vraiment dommage cependant, car ils ont, sur les autres thèmes, des articles vraiment tranchants par rapport à ce que l’on peut trouver dans la presse subventionnée.