Rappelez-vous lorsque, Stéphane Dion, chef de la Gauche [canadienne], a dévoilé son plan de taxe carbone au début de l'année. Le lobby vert a été très heureux. Il a finalement trouvé un grand homme politique prêt à parier une élection sur la promesse de mettre en oeuvre une taxe sur les combustibles de chauffage, le carburant diesel et d'autres sources traditionnelles d'énergie que les ménages consomment. Les écologistes sont convaincus que les électeurs se rassembleront autour de ce plan, en particulier parce que la taxe carbone et la hausse du prix de l'énergie qu'elle entraîne serait compensée par des réductions d'impôt ciblées pour les revenus faibles et modestes. Le Canada était ainsi promis à devenir un chef de file mondial dans le débat sur le changement climatique.
Les rêves d'une taxe sur le carbone sont maintenant anéantis, bien que peu d'écologistes se l'avouent publiquement. Plus probablement, ils vont bientôt affirmer que c'est le messager qui a failli, pas l'idée de la taxe carbone. Mais bien sûr, nous savons que c'est de la foutaise. La Gauche a fait une campagne sans équivoque sur un programme carbone neutre en terme de recettes fiscales pour sauver la planète. Celle-ci a été simplement rejetée.
Elections canadiennes 2008, nombres de sièges au parlement
Conservateurs 143, Liberal (gauche) 76, Bloc québecquois 50
New Democratic Party 37, Verts 0
La politique elle-même, et non l'intellectualisme de tête d'oeuf de M. Dion, a été la cause de la déchéance. Bien avant que la campagne ne fut lancée, les sondeurs du Parti Libéral [la gauche canadienne, NdT] lui-même avaient averti que le public n'achetait le Virage Vert. Une fuite d'un mémo de Michael Marzolini, le 29 avril, a été sans équivoque : "Nous recommandons, si une politique de taxe carbone devait absolument faire partie de notre plate-forme – et nous ne le conseillons nullement – qu'il devrait faire partie d'une stratégie environnementale plus large qui tienne compte de la réalité des propositions populaires". Ses prévisions : "faire de la création d'une taxe sur le carbone la clé de notre appel à l'électorat entraînera une perte des voix, pas un gain".
À mi-chemin dans la campagne, M. Marzolini a envoyé à ses collègues de gauche un deuxième message. Celui-ci a également mis l'accent sur la réaction négative des électeurs face à la taxe. M. Dion a finalement enterré celle-ci et à la place s'était concentré sur les événements économiques mondiaux. Mais il était trop tard, la Gauche a recueilli un maigre 26,2% du vote populaire son pire score depuis la Confédération.
Le successeur de M. Dion aura un choix simple. Conclure que les Canadiens ont eu tort de rejeter le Virage Vert, remanier la proposition et essayer le vendre à nouveau. Ou oublier l'idée et aller de l'avant.
Les écologistes de l'anti-développement feront sans aucun doute pression pour un nouveau régime fiscal contenant la taxe carbone et rebaptisé sous un autre nom. Mais la Gauche voudra arrêter l'auto-flagellation, sa première priorité étant de gagner le pouvoir. En tant que tel, leur prochain leader fera juste semblant de s'intéresser au concept et n'ira pas plus loin. Ou au moins pas plus loin que les Conservateurs.
Comme son revirement sur le libre-échange au début des années 1990 l'a montré, la Gauche apprend de ses erreurs électorales. La déchéance de M. Dion a effectivement supprimé la taxe carbone de tout débat politique sérieux. Et parce que le parti Vert canadien a, encore une fois, échoué à obtenir un seul siège, l'idée n'aura aucun défenseur au Parlement.
Il est inhabituel qu'une élection canadienne puisse avoir beaucoup d'impact sur la politique d'autres nations. Mais la décision de M. Dion d'inclure sans ambiguité possible une taxe carbone dans son programme, et la réaction des électeurs consécutive à cette décission, seront entendues à l'étranger.
Lors d'un déjeuner parrainé la semaine dernière par le Haut-commissariat du Canada à Londres pour discuter des résultats de l'élection, un journaliste britannique a judicieusement observé que le rejet de la taxe par les électeurs d'un pays du G7 pourrait avoir des conséquences sur le débat sur le changement climatique. En dépit du catastrophisme climatique de l'ONU et des effets de manche sur un prétendu "consensus scientifique", les Canadiens ont quand même refusé d'avaler la taxe. Si les Canadiens, d'ordinaire courtois (c'est ainsi qu'ils sont considérés par les Européens) sont disposés à dire "non merci" à son élite de faiseurs d'opinion, pourquoi les électeurs d'autres démocraties ne le seraient pas ?
Pour ce qui est de payer plus cher l'énergie, le Canada a trouvé sa voix dans le débat du réchauffement climatique. Mais le ton ne fut certainement pas celui que les écologistes avaient envisagé lorsque la taxe carbone avait été proposé.
Par John Williamson, chercheur à la London School of Economics, membre senior à l'Institut Fraser et membre du Manning Centre for Building Democracy.
65 réponses à “Le virage vert, une déroute mondiale”
@50_miniTax
Eh oui! Il n’y a pas de limite à la prétention paternaliste des écologistes bien pensants. Concernant les générations futures, ils n’ont rien inventé. Ils justifient leur discours en puisant dans la doctrine articulée de l’éthique de la responsabilité prospective, élaborée par le philosophe allemand Hans Jonas.
Peut-on m’expliquer ce charabia :
http://fr.news.yahoo.com/2/200…..ff8aa.html
ou l’histoire des deux planètes nécessaires en 2030 (dépêche Yahoo « mystérieusement » disparue dans la matinée) ?
Parce-que là je suis vraiment largué.
Est-ce une propagande « communiste » à l’échelle planétaire?
Ces gens savent-ils qu’à « l’état de nature » la surface nécessaire pour nourrir un seul individu permettrait à la France d’etre peuplée d’environ 35000 personnes?
Que donnerait le calcul de » l’empreinte écologique » du « Français moyen » dans cette hypothèse idéale?
@52
Vieux thème malthusien qui ressort de temps en temps. Dans les années 70, des agronomes sérieux donnaient déjà comme possibilité pour l’agriculture de nourrir 15 milliards de personnes.
Il y a des gens qui évoluent moins vite que le climat. Mais ce réflexe est à prendre au sérieux car il est récurrent.
J’ai retrouvé la dépêche des « deux planètes »:
http://fr.news.yahoo.com/2/200…..ff8aa.html
Je crois que notre ex-président l’avait déjà sortie lors d’un dsicours en Afrique du Sud il ya quelques années.
@Flo,
J’ai recherché comment est calculé ce truc sur le site du WWF : rien trouvé mais il faudrait plus de temps.
Je remets le lien signalé par Astre-noir dans une autre liste de discussion de ce site
http://www.rue89.com/systeme-g…..ieux-faire
C’est éclairant….
@Auracan.
Je dirais même ébourifant.
Question à la « WWF – Greenpeace – Goreporation » :
Les bidonvilles sont-ils l’image qu’ils se font du « retour à l’état de nature » du futur?
Le « bon sauvage » de là bas dispose-t-il de sa « lieue carrée » d’espace pour y rechercher « librement » et en harmonie avec mère nature ses moyens de subsistance?
Non plutôt de diminuer notre consommation, même celle qui est comprise dans l’organisation d’une société (les routes, infrastructures diverses) en oubliant la disparité des situations économiques de nos concitoyens (et que certains ont du mal a avoir accès aux soins…par exemple).
Avec ce genre de calculs, on en revient à démontrer qu’il faut vivre avec le strict minimum pour ne pas mourir de faim et de froid. Les reste c’est du luxe. Je suis un peu dur car il faudrait regarder exactement la méthodologie des calculs faits mais je pense qu’il y aurait beaucoup à discuter. Mais on y reviendra certainement.
Lorsque je lis tout ce qui est dit sur notre excès de consommation, je m’interroge :
– à l’instar du dérèglement climatique, quelle est la règle? Comment définir ce qui est suffisant, nécessaire, y compris la part de luxe/rêve nécessaire à chacun,
– les quelques exemples de surconsommateurs ne doivent pas masquer que la plus grande part de notre consommation est celle de gens qui vivent la vie la plus ordinaire qui soit.
@Flo,
Un petit tour chez Wiki, et une première explication du mode de calcul :
@52_Flo
Sur les « deux planètes ». Tout cela est à mon humble avis de l’idéologie verte. Sauf catastrophe cosmique, en 2030 (c’est demain matin!) les hommes existerons toujours sur Terre. Certains y vivront bien, d’autres y vivront mal, comme d’habitude. Le problème n’est pas théorique mais pratique — soit politique et économique. C’est le même problème depuis l’antiquité : celui de l’accaparement, de la distribution et de l’utilisation des ressources. L’apocalypse n’est jamais globale ; elle est toujours locale. Il est quand même fascinant de constater que certains en désire une globale…
@60
Précision : d’un point de vue purement logique, les annonciateurs de la fin du monde ne pourront jamais avoir raison, à moins que le fin du monde qu’ils annoncent se réalise. Or cela, ils le savent. Voilà donc pourquoi ils l’a désirent … inconsciemment. Cher Sigmund, aidez-nous!
Un article absolument savoureux 😉 🙄
wattsupwiththat.com/2008/11/04/a-look-at-the-dow-jones-industrial-average-and-sunspots/#more-3997
J’essaye de le traduire…
Mais corrélation n’est pas cause….
Les californiens ont récemment refusé des lois promouvant les énergies renouvelables et les carburants alternatifs. C’est assez étonnant quand on sait que la californie est présenté comme l’état le plus sensible aux causes écologiques.
http://www.pensee-unique.fr/bonnetdane.html
@63_floyd
Oui, j’ai lu cela aussi. Politiquement, l’idée ne passe manifestement pas du tout. Donc si j’étais un prêtre vert, je déclarerais les Californiens bon croyants mais mauvais pratiquants…
@Sirius,
Ils sont surtout logiques : contrairement à ce que les instituts de sondage cherchent à nous faire croire, les gens ne veulent surtout pas casquer pour du « vert »…